Aurélie Dezac, tout l’art du contre-pied

Aurélie Dezac, tout l’art du contre-pied

Avec sa marque « ÏSIS CHERIE », cette trentenaire Pierrefittoise se lance dans la création de souliers féminins « adaptés à toutes les silhouettes de pieds. » Motivée par sa propre expérience de femme lassée de ne jamais « trouver chaussure à son pied », elle veut innover en alliant esthétique et confort.

Si beaucoup d’aventures entrepreneuriales ont commencé dans un garage ou dans le salon d’un appartement, celle d’Aurélie Dezac, créatrice de la marque de chaussures ÏSIS CHERIE est en train de prendre son essor dans la chambre où elle a nourri ses rêves d’ado…

C’est depuis le QG provisoire de l’appartement de ses parents à Pierrefitte-sur-Seine que cette trentenaire gère en effet, ces dernières semaines, la réception des premières créations d’une marque qui s’est fixé comme leitmotiv de commercialiser des souliers féminins « adaptés à terme à toutes les silhouettes de pieds » (fins, larges, très larges, avec œdèmes, etc.)

Fabriqués artisanalement au Portugal, les modèles pensés par Aurélie Dezac sont une solution attendue pour toutes celles qui n’ont jamais vraiment trouvé chaussures à leurs pieds. Une expérience trop souvent vécue par Aurélie subissant aussi bien « les moqueries que la honte de montrer (ses) larges panards ». Et surtout des flops incessants pour dénicher des modèles « féminins, cool et confortables. Des chaussures qui doivent être toutes aussi belles que bien pensées… »

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Jouer la surprise...

Alors, lorsqu’on est mal servi, autant créer « ÏSIS CHERIE », une marque dont le prix moyen de lancement variera autour de 185 euros.

Aurélie Dezac aura pris un plus grand élan. Car la jeune femme qui a mené une partie de sa carrière professionnelle dans la gestion financière entend bien rendre sa marque plus accessible pour mêler « inclusion sociale et santé. Pour le moment, on entre dans la catégorie d’un savoir-faire abordable pour des produits fabriqués entièrement à la main. Reste que pour moi, qui ai grandi dans un milieu modeste en Seine-Saint-Denis, l’ambition c’est évidemment de rendre ma marque accessible au plus grand nombre. Mais, pour l’instant, je travaille encore à ma petite échelle d’entrepreneuse solo, donc je fais au mieux pour gérer les coûts. »

De toute façon, la récente lauréate du Prix Quartiers Créatrices d’Avenir 2024, un concours porté par Initiative Île-de-France – un réseau associatif d’accompagnement et de financement des entrepreneurs de la région francilienne – a l’art de prendre le contre-pied lorsqu’un obstacle se dresse devant elle. Pour démocratiser ÏSIS CHERIE, l’ambassadrice du In Seine-Saint-Denis compte ainsi distribuer ses chaussures produites en série limitée « pourquoi pas dans des lieux du quotidien surprenants comme un fleuriste et j’ai même pensé à un garage ! Bon, je pars parfois dans des délires, sourit-elle, mais l’idée est bien de provoquer la conversation, d’expliquer qu’en France, il y a quand même une femme sur trois qui souffre de pieds larges. Sans compter celles qui ont un hallux valgus ou subissent un problème de rétention d’eau. »

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Combattre les complexes

Une nécessité de confort qu’elle souhaite habiller d’un côté glamour symbolisé par le nom de sa marque, référence directe à l’une des divinités les plus populaires du panthéon égyptien. « Ce nom, c’est d’abord parce que je suis fan de culture et d’art, précise la jeune femme qui a aussi été administratrice de compagnies culturelles. Et puis, comme dans la mythologie égyptienne, Isis représente la déesse surpuissante de l’amour de la féminité, de la confiance en soi, de l’audace, je trouvais que c’était un beau message pour redonner confiance à celles qui ont, comme moi, souffert de complexes par rapport à leurs pieds. Moi, je les ai toujours cachés, dans l’intimité où même à la plage lorsque j’allais aux Antilles d’où sont originaires mes parents. Et « chérie », en dehors de la référence au roman –Chéri- de Colette que j’adore, c’est l’idée de chérir ce que l’on est, d’avancer dans la vie malgré les difficultés. »

Un message tout en positivité qu’elle veut aussi véhiculer du haut de son rôle d’ambassadrice du In Seine-Saint-Denis qu’elle n’a d’ailleurs pas toujours ressentie comme taillé pour elle : « Longtemps, j’ai voulu fuir mon quartier prioritaire de la ville à Pierrefitte, et j’ai tout fait pour aller ailleurs, à l’étranger, ou à Paris », confesse-elle d’emblée. Mais, avec le recul, je me suis aperçue que la capitale a ses « limites », est aussi emplie de mirages.  Alors, aujourd’hui, c’est une fierté de construire mon entreprise depuis Pierrefitte, de montrer que ce que je suis, je le dois aussi mes valeurs forgées en Seine-Saint-Denis, grâce à mes parents. Mais aussi parce que ma Seine-Saint-Denis, c’est beaucoup de joie, de créativité, de résilience, malgré les difficultés sociales ou économiques. »

Une bonne façon finalement de prendre la vie du bon pied…

Frédéric Haxo

Crédits photo : Sophie Loubaton

Les images ont été faites chez Maison Lajoie, une boutique de décoration d’intérieure créée par Nailletine Lajoie au Raincy.

Une marque à suivre pas à pas In Seine-Saint-Denis

C’est symboliquement le 8 mars prochain lors de la Journée internationale des droits des femmes qu’Aurélie Dezac va organiser un showroom éphémère des créations de sa marque Ïsis Chérie au sein de la Maison Lajoie au Raincy. Une boutique de design d’intérieur ouverte fin 2024 par Nailletine Lajoie, une autre jeune entrepreneuse made In Seine-Saint-Denis.

Enfin, la marque Ïsis Chérie sera aussi exposée jusqu’au 22 mars dans les locaux de la Fabrique Pointcarré à Saint-Denis, dans le cadre d’un espace de présentation à visée pédagogique.