Pimp Your Waste, la « petite » entreprise qui envoie du bois…

« Innover, réutiliser, magnifier… » C’est avec ses trois mots d’ordre qu’un jeune quatuor d’architectes se lance en 2018 dans la création de « Pimp Your Waste », un projet de fin d’études lié au réemploi du bois qui deviendra vite une entreprise. A l’époque, les quatre élèves de l’École nationale supérieure d’architecture Paris Malaquais s’attaquent à un cas très pratique : la réalisation en matériau de réemploi d’un salon de conférences et de mobilier urbain pour le « Fab City Summit », un sommet des villes adeptes de l’économie circulaire, organisé dans le parc de la Villette. « C’est comme ça qu’on a mis un premier pied en Seine-Saint-Denis puisqu’on a commencé à travailler avec une déchetterie de Pantin », raconte Fabien Caron, l’un des quatre co-fondateurs de PYW, originaire du Nord de la France. Au départ, tout s’est construit de manière un peu informelle, mais on commençait déjà à poser les bases de ce qu’est aujourd’hui notre entreprise… »

Un gisement encore peu exploité

Des bases très solidement charpentées puisqu’elles reposent sur un gisement consistant de matériaux quand à peine 1 % des déchets issus de la construction sont peu ou prou réutilisés, selon une étude réalisée en 2021 par l’ADEME, l’Agence de la transition écologique.
Bref, une véritable manne pour Pimp Your Waste qui choisit, dans un premier temps, de fabriquer du mobilier en faisant feu de tout bois : c’est-à-dire en utilisant aussi bien des matériaux de chantier de déconstruction – parquets en chêne massif ou faux plafonds- que du bois issu de l’événementiel et de ses stands éphémères. Autre source d’approvisionnement, la récupération de mobiliers de bureau, comme ceux de la Commission Européenne.
Tout un matériel hétéroclite que Pimp Your Waste s’emploie alors à utiliser de manière plus rationnelle en mettant en place différents outils numériques : « Une de nos idées de base, rembobine Fabien Caron, c’était aussi de dépasser une méthode très artisanale dans le choix des matériaux pour s’appuyer sur une technologie d’algorithmes capable de nous aider à gérer des matériaux qui n’ont rien de standard, avec une matière qui change constamment selon les stocks de bois récupérés. »

Direction Romainville pour s’agrandir...

Bref, en laissant de côté la technique du doigt mouillé dans le choix de ses bois, Pimp Your Waste agrandit ses horizons et rejoint ainsi progressivement le marché des agencements d’espaces pour les collectivités et les entreprises. Largement de quoi se retrouver de plus en plus à l’étroit dans son premier atelier de la « Plateforme des Acteurs de Demain Absolument Fantastiques » à Antony (92). En 2022, direction donc la Seine-Saint-Denis et le quartier de l’Horloge à Romainville. Dans cette partie du département 93 en plein transformation urbaine, l’agglomération Est Ensemble ouvre en effet à la petite entreprise dirigée par Fabien Caron la possibilité d’occuper temporairement un ancien local d’activités, transformé en un tiers-lieu et partagé depuis deux ans avec le Larocafé. « On a toujours eu la volonté de s’implanter en Seine-Saint-Denis où beaucoup de choses ont commencé pour nous et puis cette installation était dans la logique du soutien qu’apporte le Département de la Seine-Saint-Denis au développement de l’économie circulaire », prolonge Fabien Caron.

Tant et si bien que Pimp Your Waste emploie aujourd’hui quatre salariés et quatre apprentis dans son atelier romainvillois réparti sur plus de 500 m2. Un lieu où la production passe aussi par l’insertion, l’une des autres marques de fabrique de PIW qui dès ses débuts à Antony a travaillé de concert avec l’association Aurore sur l’insertion d’une main d’œuvre de réfugiés Afghans.

« Et, désormais en Seine-Saint-Denis, on a également la chance de travailler avec un tissu local fort où beaucoup d’associations s’appuient sur la menuiserie pour construire des parcours d’insertion, poursuit Fabien Caron. Juste à côté de chez nous, il y a par exemple « We are all builders » avec qui nous commençons à tisser des liens. »
Entreprise appartenant à la sphère de l’économie sociale et solidaire, cette dernière travaille en effet en priorité avec des personnes issus des quartiers politiques de la ville ou les réfugié.e.s, demandeurs.euses d’asile.

Une collaboration made In Seine-Saint-Denis

Une logique d’insertion que Pimp Your Waste a par exemple porté lorsqu’elle a réalisé, début 2024, la signalétique des œuvres d’art installées au cœur du Village Olympique et Paralympique des Jeux de 2024 implanté entre Saint-Ouen, L’Île-Saint–Denis et Saint–Denis. Et, c’est cette même ambition d’insertion qui sera de nouveau à l’œuvre dans le prochain grand chantier de Pimp Your Waste : l’ameublement de la « Fabrique de l’émancipation » à Romainville, plus de 1000 m² dédiés à devenir un tiers-lieu municipal de formation et d’inclusion socio- professionnelle pour les habitants du quartier Gagarine. Une future réalisation qui fera d’ailleurs l’objet d’une coopération entre deux ambassadeurs du In Seine-Saint-Denis : « Sur ce chantier ambitieux, on va effectivement combiner nos expertises et nos compétences avec le collectif d’artisans et de designers Arti’Chô installé à Noisy-le-Sec. Pour nous, c’est un bon moyen de mener un projet à plus grande échelle et de démontrer qu’il existe bien, en Seine-Saint-Denis, un écosystème autour de l’économie circulaire et de la transition écologique », développe encore Fabien Caron.

Une manière également pour PYW d’amorcer la suite de ces sept premières années de croissance. « L’enjeu, c’est maintenant de pérenniser notre modèle économique dans un marché du réemploi qui est en train de se structurer jour après jour, d’être capable de répondre à des demandes plus importantes en modernisant encore notre outil de production, se projette déjà son co-fondateur. S’appuyer, par exemple, sur l’investissement d’un fond à impact, nous permettrait d’être plus compétitifs, donc de réemployer encore plus de matériaux. »

Une sorte d’éternel recommencement bien dans l’ADN de Pimp Your Waste…

Frédéric Haxo

Crédits photos : Sophie Loubaton