Talla Dieye, avec lui l’art ne fait pas chambre à part…
A Aubervilliers, le tiers-lieu « Les Chambres » dédié à « la création contemporaine émergente » fêtera ses quatre ans début 2025. Avec toujours la même ambition de « faire vivre l’art » In Seine-Saint-Denis. Malgré des débuts qui n’ont pas été franchement de tout repos. Récit d’une aventure artistique.
Quand le couple Talla Dieye et Maria Mata décide, en 2019, de se lancer dans la création d’un tiers-lieu dédié à l’art et au tatouage à Aubervilliers, ils ont 200 euros en poche et 720m2 d’un immense local à rénover du côté du 57 boulevard Anatole-France. Presque deux ans plus tard, en mars 2021, le lieu baptisé « Les Chambres » ouvre au bout de « 363 journées de chantier dont 208 jours un peu seuls, avec 200 sacs de gravats et trois bennes à recycler, et aussi des centaines d’heures passées derrière un marteau piqueur » plaisante aujourd’hui, et avec plusieurs mois de recul, Talla Dieye. Mais, ça valait le coup, même si nous n’étions pas au bout de nos peines avec le Covid et les confinements qui allaient animer nos premiers mois ! »
Une fois traversée cette tempête initiale, le concept des Chambres, espace de vie autour de l’art contemporain et de la bonne bouffe, a su se démarquer dans l’univers des tiers-lieux. Au point d’être distingué par 11 prix, récompenses ou distinctions dans le domaine de l’entreprenariat et de l’innovation sociale. Surtout, Les Chambres, ce sont désormais plus de 250 artistes programmés ou accompagnés au cours de leurs premiers pas dans la carrière artistique. « Et c’est bien ça, le plus important, poursuit Talla Dieye, parce que le concept premier des Chambres, c’est bien de faire vivre l’art et d’aider les artistes à vivre de leur art. D’ailleurs, le plus dur lors de nos débuts a sûrement été d’expliquer ce qu’on voulait faire ! »
Un univers cosy et coloré
Mais, aujourd’hui, l’univers coloré, cosy et chaleureux des Chambres est également très bien identifié : sur les 720 m2 patiemment rénovés par Talla et sa compagne Maria, on trouve ainsi un restaurant, des espaces de coworking, une galerie, des espaces dédiés aux artistes tatoueurs émergents, un atelier de création céramique mais aussi un incubateur.
Lequel est porté par le programme « Légitime.s qui œuvre à la professionnalisation de la création émergente », décrit Talla Dieye. Avec comme objectif derrière cet incubateur de démocratiser un peu plus l’accès aux carrières artistiques. Pour de jeunes diplômés des Beaux-Arts, on va, par exemple, mettre en place les outils juridiques qui leur permettront d’avoir accès à un statut professionnel. Et on les aide aussi sur l’aspect de la confiance en soi, de manière à dépasser le syndrome de l’imposteur, qu’ils puissent vraiment se considérer comme des artistes et n’aient pas peur de le revendiquer. Enfin, on les aide aussi à développer leur communication. »
Un soutien pour les créateurs
Des formations de 3 à 6 mois accessibles à partir de 2 000 euros qui « fondent une partie de notre modèle économique, développe encore le fondateur des Chambres. Un modèle qui est aussi supporté par notre activité de restauration, nos organisations évènementielles et les espaces de coworking que nous commercialisons. »
L’une dans l’autre, toutes ces activités se rejoignent avec « toujours en ligne de mire et en commun l’ambition de promouvoir l’art et le beau au cœur de la Seine-Saint-Denis. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard, si nous avons construit notre projet dans le 93, parce que derrière ce que l’on fait, il y a un engagement sociétal. Nous n’avions pas envie que les Chambres deviennent simplement un lieu à la mode, pas loin du périph’. Une adresse pour les Parisiens, mais fermée aux habitants du quartier. Au contraire, ce que l’on veut, en étant nous-mêmes aujourd’hui habitants de la Seine-Saint-Denis, c’est ouvrir la culture au plus grand nombre au cœur d’Aubervilliers. »
Ouvrir l’art In Seine-Saint-Denis
Un pari en passe d’être réussi pour le duo d’ambassadeurs In Seine-Saint-Denis, Maria Mata et Talla Dieye, originaires respectivement d’Espagne et de Dordogne : « C’est vrai que Les Chambres, c’est d’abord une aventure à deux, même si nous avons été entourés de beaucoup de gens bienveillants et de conseils en Seine-Saint-Denis, en particulier du côté de la marque territoriale du In Seine-Saint-Denis. Un bon booster lorsqu’on entreprend, surtout que l’avenir des Chambres désormais, c’est de construire sur du plus long terme, pourquoi pas en recevant le soutien d’un mécène ou d’un entrepreneur de l’art, capable à la fois de nous apporter des fonds, mais aussi de l’expertise et du réseau pour continuer de faire rayonner l’art et les artistes en Seine-Saint-Denis. »
Afin de créer, pourquoi pas, d’autres « Chambres » en ville…
Frédéric Haxo
