Territoire(s), terrain d’exploration photographique In Seine-Saint-Denis
Lauréate de l’édition 2024 du concours photographique Territoire(s), Wendy Sama est à l’affiche de la MC93 jusqu’au 12 avril. Elle est aussi la cheffe de file d’une promotion de photographes qui porte, chacun.e à sa manière, un regard singulier In Seine-Saint-Denis.
Territoire(s), c’est depuis 2019, un concours photographique qui agit comme un révélateur de talents In Seine-Saint-Denis. Et pas seulement en consacrant un lauréat chaque année, à l’instar de la Nocéenne Wendy Sama dont le regard posé sur les parcs départementaux et celles et ceux qui les traversent, est visible jusqu’au 12 avril prochain dans le vaste hall d’accueil de la MC93 – lire notre encadré ci-dessous.
Depuis deux éditions Territoire(s) s’étend en effet un peu plus en portant, à côté des lauréats, une « promo », composée de sept photographes en 2024. Lesquels bénéficient du réseau du In Seine-Saint-Denis et de ses partenaires pour valoriser, creuser leurs projets photographiques présentés à l’occasion du concours organisé au printemps dernier.

Un objectif très anglé
Une bonne opportunité, par exemple pour le Sevranais Mamadou Dramé qui concilie la photo avec son métier de travailleur social, de ne pas lâcher son projet de faire défiler derrière son objectif « jour après jour, les évolutions de la gare de Sevran-Beaudottes, mon quartier. » Un pan du 93 qui évolue en effet constamment avec l’ouverture à l’horizon 2026 d’une des stations de la ligne 16 du métro du Grand Paris Express. Une arrivée en gare qui changera son rythme de vie. Toute une histoire qui se construit donc sous l’objectif très anglé de Mamadou Dramé et passé, au printemps dernier, par le filtre attentif de Territoire(s). Une manière aussi pour l’artiste-photographe « de se sentir soutenu, de pouvoir échanger sur mon projet avec des professionnels de la photo, une bonne façon également d’avoir un ressenti immédiat que l’on n’a pas forcément quand on travaille, un peu, en mode solitaire. »
Ce qui n’est pas forcément un désavantage aux yeux d’Arnaud Levénès, membre du jury de Territoire(s) 2024 et directeur de La Capsule, lieu de résidence photo au Bourget : « La force de Territoire(s), c’est d’être un concours où on retrouve souvent un travail photographique qui n’a rien de formaté. Ensuite, c’est à nous, côté jury, de les aider à faire grandir leurs projets, en les guidant vers des résidences artistiques ou des structures qui leur permettront de faire émerger encore un peu plus leurs regards photographiques sur le 93. »

Un coup de « boost » et du soutien
Chose faite d’ailleurs à l’issue de Territoire(s) puisque plusieurs membres de la « promo » 2024 ont pu visiter différents lieux emblématiques de la création artistique In Seine-Saint-Denis, tout en rencontrant les équipes de ces structures. Aussi bien la Fondation Fiminco à Romainville, la Capsule au Bourget, les Ateliers Médicis à Clichy-sous-Bois, la MC93 à Bobigny ou encore en découvrant les dispositifs de soutien à la création lors d’une rencontre avec le service culture, art et territoire du Département de la Seine-Saint-Denis. « Ce sont des portes qui s’ouvrent plus facilement devant nous, apprécie Céline Claret, l’un des membres de la « promo » 2024 qui se définit comme « une photographe de la violence et du rêve. »
Également développeuse web établie du côté de Pavillons-sous-Bois, elle mène en parralèlle ses projets photographiques « autour de la conspiration du silence et des violences intrafamiliales. » Un thème évidemment exigeant et fort qui « nécessite du soutien, prolonge Céline Claret. Parce que porter une démarche artistique, un regard sur la société, ça peut être épuisant, y compris financièrement. C’est pour cela que Territoire(s) en nous accueillant dans différents lieux de création en Seine-Saint-Denis, en nous faisant rencontrer les équipes qui les font vivre, nous donne un sérieux coup de boost… »

Confronter les regards
Et c’est d’ailleurs l’un des autres objectifs poursuivis par Territoire(s) comme l’explique Hortense Archambault, directrice de la MC93 à Bobigny : « C’est aussi pour cette raison que Territoire(s) devient de plus en plus repéré dans l’univers des concours photographiques, porter une promo a un sens pour nous comme pour les candidats parce que cela crée une émulation artistique, et c’est ce qui fait, finalement, la qualité de l’édition 2024 du concours. »
Jeune photographe free-lance, Luccia Anyomi, prolonge ce point de vue du haut de ses 21 ans qui l’ont amené à réaliser une série photo autour du thème des « role-models » pour la jeunesse de Seine-Saint-Denis : « Ce n’est jamais inutile de confronter son travail à des regards extérieurs, surtout que nous, photographes, vivons justement du regard des autres. Et puis, un tel concours, c’est clairement une manière de rencontrer des gens, d’autres photographes, des acteurs de la culture en Seine-Saint-Denis. Et là-aussi, la rencontre est un élément clé dans notre métier. »
Des « collages urbains » à partir de photos
Une manière d’avancer que confirme aussi Florian Schmitt, même si son parcours est totalement différent de celui de Luccia Anyomi. Quarantenaire grandi en Allemagne et établi dans l’Hexagone pour suivre à Paris-8 Saint-Denis, un master en photographie et art contemporain, Florian Schmitt concilie architecture et photo en créant des « collages urbains » à partir d’éléments du patrimoine architectural de la Seine-Saint-Denis. « Territoire(s), c’est donc pour moi une bonne manière de montrer ce que je fais, de connaître aussi davantage de gens qui habitent le 93, parce que lorsqu’on s’intéresse à l’architecture, la Seine-Saint-Denis est un immense terrain d’exploration, résume-t-il. Alors autant le découvrir en bénéficiant aussi du regard des personnes qui le connaissent le mieux. »
Car, pour un photographe, un œil averti en vaut deux…
Frédéric Haxo
Crédits photo : Bruno Lévy
- La promotion 2024 de Territoire(s) : Luccia Anyomi, Julie Bornand, Virginie Bouilhac, Céline Claret, Mamadou Dramé et Florian Schmitt.
Wendy Sama, l’an 5 avec « Hedera »
Lauréat de Territoire(s) 2024, le travail de la Nocéenne Wendy Sama est à découvrir à la MC93 jusqu’au 12 avril prochain.
Ultime lauréate, série en cours, du concours photographique Territoire(s) In Seine-Saint-Denis, Wendy Sama expose son regard sur son département jusqu’au 12 avril prochain dans le hall de la MC93. A découvrir l’expo « Hedera », du nom d’un arbuste que la photographe, trentenaire autodidacte, a déniché dans le parc du Croissant Vert à Neuilly-sur-Marne. Un arbuste aux « feuilles toujours verdoyantes quelle que soit la saison » qui donne l’idée à l’artiste de se mettre en quête d’autres êtres, qui ont également pris racine dans la terre de la Seine-Saint-Denis. « Photographier dans les parcs, explique la Nocéenne Wendy Sama, c’est aussi photographier le lien entre ces lieux et les individus qui les traversent ou les façonnent. Cette idée m’a naturellement conduit à inclure des participants dont les interactions et les empreintes sont des éléments constitutifs de l’existence même de ces espaces. »
« Des filtres vintages »
Une « esthétique silencieuse » qu’elle n’a pas hésité à rendre plus parlante, cette fois via une « recherche de texture et de mouvement » dans ces portraits. « Pour cela, poursuit-elle, je me suis procuré des filtres « vintages », que l’on peut fixer sur l’objectif et je n’ai pas hésité à expérimenter avec différents matériaux, comme de la vaseline pour créer des effets de mouvement, ou encore en découpant des formes dans des feuilles de gélatine. L’objectif était de capturer ces textures et mouvements directement lors de la prise de vue. » Mais, mieux que des mots, allez voir Hedera de Wendy Sama à la MC93…
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