Zoshia, chanteuse à la corde sensible

Zoshia, chanteuse à la corde sensible

Courneuvienne d’adoption, l’artiste, qui a l’art de mêler les rythmes dansants de l’électro-pop à des textes engagés, aime arpenter la Seine-Saint-Denis pour lui donner corps et un peu plus d’âme dans ses clips. Portrait.

 

Du Nord de la France au nord de Paris, il y a quelques pas que Manon Brioist – alias Zoshia, son nom de scène- a franchis en 2020 pour s’installer à La Courneuve.

Une ville au passé ouvrier important -tout comme son Nord natal- où la chanteuse et musicienne se sent bien, au point d’y avoir enclenché un projet artistique intitulé « Comme tout le monde ».

Lequel est aussi le titre d’une une chanson éponyme écrite et interprétée par Zoshia où elle « aborde la vieillesse avec tendresse, en portant un regard intime sur le vécu des séniors. » Un projet musical qui s’articule comme un diptyque unique où se mêlent la chanson originale écrite et interprétée par Zoshia, et des interviews musicales de séniors aux destins forcément particuliers.

Une manière comme une autre pour Zoshia, qui se définit « comme une sociologue de la chanson » d’aller beaucoup plus loin que de simples ritournelles aux rimes futiles.

Pour écrire « Comme tout le monde », Zoshia a ainsi mené une série d’interviews avec trois personnes âgées dont les parcours ont fini par nourrir ses textes et sa musique. Charge à elle, ensuite, de mettre cette histoire en images, à partir de 2025, à travers un clip où il s’agira d’évoquer « la solitude et l’isolement des séniors. » Mais toujours de façon pop et décalée : « L’idée, poursuit la chanteuse, musicienne et réalisatrice, c’est surtout de rester positif pour parler du passage vers l’âge sénior qui n’est pas toujours simple… »

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Des clips made In Seine-Saint-Denis

Une histoire qui s’inscrira également dans un paysage In Seine-Saint-Denis puisque l’artiste protéiforme a choisi le Parc départemental Georges-Valbon, le parc des Sports de Marville ou encore un bistro courneuvien, comme futurs décors de son clip. Autant d’éléments de la vie quotidienne des séniors de la Maison Marcel-Paul de la Courneuve que Zoshia associe à son projet.

Tout comme une trentaine d’étudiants du BTS Communication du lycée Jacques-Brel qui apprendront les bases du montage ou de la logistique d’un tournage à l’occasion du prochain tournage du clip. « Une bonne occasion de découvrir les coulisses des métiers de l’audiovisuel, de manière très concrète, au cœur d’un tournage réalisé tout près de chez eux », explique l’artiste qui investit ainsi pleinement son rôle d’ambassadrice du In Seine-Saint-Denis. « Pour moi, vivre dans le 93, c’est aussi y faire des choses, participer à la vie sociale de ma ville La Courneuve, avec l’envie de raconter la richesse humaine de ce département, en travaillant avec ses habitants, mais aussi en filmant dans mes différents clips, l’incroyable patrimoine architectural de la Seine-Saint-Denis. C’est d’ailleurs ce qui m’a amenée en 2024 à tourner le clip de ma chanson « On s’en sort » dans les décors des ex-usines Babcock de La Courneuve. Être ambassadrice, c’est pour moi montrer la Seine-Saint-Denis, dans tous ses aspects, donc des visages, mais aussi des lieux souvent trop méconnus. »

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L’univers du marché des 4-Routes

Vous l’aurez compris, Zoshia aime avant tout raconter des histoires humaines à travers ses textes. « On s’en sort » dont on vient de vous parler, un titre sorti en novembre dernier, s’inspire, par exemple, de l’interview d’une jeune femme Dalva, diffusée le même jour sur le net, qui « aborde les troubles du comportement alimentaire et le rapport complexe que nous entretenons avec notre corps, en particulier pour les femmes. »

Dans « Jeu d’enfant », un de ses premiers titres, elle met également en chanson le parcours d’une mère qui n’a d’autre choix que de mentir à son enfant en lui répétant, comme un mantra, que tout ira bien. « À travers les chansons, je veux d’abord parler des gens dont on parle peu, c’est pour cela que mes chansons sont très sociales », précise-t-elle.

Un titre dont le clip a lui été tourné au cœur de la Halle du marché des Quatre-Routes à La Courneuve : « Comme je n’arrive pas encore complètement à vivre de ma musique, je travaille souvent dans des bars parisiens, ce qui m’amène à rentrer à La Courneuve au petit matin, vers 5 heures. L’heure où je croise les marchands qui montent leur étal, par tous les temps, dans le froid, la pluie, l’humidité, expose la chanteuse aux 25 printemps. C’est toute une atmosphère, un lieu plein de vie(s) que j’ai eu envie de montrer à ma manière… »

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Danser, étudier, jouer...

Pour ce qui est de la chanson personnelle de Zoshia, il faut quitter, cette fois, La Courneuve et retourner dans le Nord minier, théâtre de l’enfance de la jeune Manon qui n’est pas encore Zoshia : après avoir découvert le piano et la danse dès l’enfance, la jeune femme, élevée par sa mère, intègre à 13 ans le Conservatoire à rayonnement régional de Lille pour suivre un parcours en classe à horaires aménagés danse (CHAD). C’est alors l’apprentissage de la danse classique, avec toute la discipline et la rigueur qui accompagnent la réussite des pas de deux. En parallèle, elle virevolte aussi côté études puisqu’après son bac, elle prend la direction de Menton, près de Nice, pour suivre le cursus « Méditerranée / Moyen-Orient » de Sciences-Po Paris.

Au programme, très consistant, de cet exil provisoire vers la « Grande Bleue », des cours de politique internationale, d’économie, de sociologie, mais aussi des cours d’arabe.

Seulement, dans le sud, Zoshia perd le Nord et ne s’épanouit pas franchement. Alors direction Paris et La Courneuve en 2020, le moment où elle choisit de rejoindre le Cours Florent, l’école qui « forme les artistes de demain. »

Pendant trois ans, en parallèle de sa formation théâtre, Manon se plonge aussi intensément dans l’univers musical, au point de se dédoubler et de devenir Zoshia, un nom de scène choisi en hommage à sa mère surnommé Zosia lorsqu’elle était enfant. Un héritage de ses racines polonaises.

Afin de mettre ses textes en musique, Zoshia apprend vite à composer par elle-même, s’appuyant sur son art du bidouillage des logiciels de MAO : autrement dit la musique assistée par ordinateur.

« J’adore passer du temps à chercher de nouveaux sons qui vont accompagner mes paroles. Des textes qui n’ont donc rien d’anodin pour cette admiratrice des paroles de Jacques Brel, Léo Ferré ou même Pierre Bachelet, interprète indissociable du titre « Les Corons. »

Trois chanteurs qui racontent, chacun à leur manière, une part de leur époque. Tout comme Zoshia dont la philosophie est de « faire de la musique pour parler des autres, et laisser les autres parler en musique… »

Frédéric Haxo

 

Crédits photos : Sophie Loubaton

Les graffs sont une œuvre collective de la Résidence Artistique Libre « La Babcockerie »

Pour suivre l’actualité musicale de Zoshia sur sa chaîne YouTube, c’est par ici !

 

 

 

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Zoshia - « SANS TROP PENSER », un clip tourné dans les anciens vestiaires ouvriers des Usines Babcock à la Courneuve en juin 2024

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