Artisan du Tourisme : un Label pour la beauté de l’art…

Artisan du Tourisme : un Label pour la beauté de l’art…

Créé en 2023, le Label « Artisan du Tourisme » en Seine-Saint-Denis met à l’honneur une première promotion de 21 artisans œuvrant dans l’univers des métiers d’art et des métiers de bouche. Le In est parti à la rencontre de ces passionné.e.s avec une nouvelle étape auprès de trois ambassadrices, qui de la céramique à la chapellerie en passant par la bijouterie, cultivent l’art de créations made In Seine-Saint-Denis.

Florence Sempé, la céramiste haute en couleurs

Après une première vie sur les plateaux de tournage, cette Bagnoletaise d’adoption a tourné la page en passant un CAP de tournage… en céramique. Portrait. 

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Des tournages des plateaux télé à un CAP tournage en céramique, la formule d’attaque de ce portrait est toute trouvée pour résumer l’itinéraire de Florence Sempé, créatrice de « La céramique de Flo » à Bagnolet. Tout commence donc dans les années 2000, l’époque où la Bagnoletaise d’adoption exerce alors le métier de régisseuse pour le cinéma et la télévision. A la recherche d’un décor pour une prochaine production, elle déniche « un appartement où il y avait aussi un atelier de céramiste, se souvient-elle. Il y avait de la matière bien sûr, mais aussi des créations avec beaucoup de couleurs, ça m’a littéralement marquée ! » 

Une découverte qui ne reste pas sans lendemain(s) puisqu’elle commence à prendre des cours pour pratiquer la technique du façonnage par tournage. Ce qui la persuade de tourner, peu à peu, la page des plateaux de télé et de cinéma : « J’avais arrêté l’école à 17 ans et je m’étais retrouvée dans ce monde-là après pas mal de petits boulots, raconte-t-elle. J’organisais, entre autres, des défilés de mode et mon père, qui était ingénieur du son dans le cinéma, m’avait persuadé qu’être régisseuse c’était un peu la même chose que les défilés : un boulot d’organisation. »  

Des séries télé à Montreuil 

Entre 1990 et 2005, Florence Sempé, 55 ans aujourd’hui, arpente donc les plateaux de cinéma et de télé, figurant aussi bien au générique de productions comme les « Caprices d’un fleuve » de Bernard Giraudeau ou « de séries télé avec des flics qui m’amenaient pas mal à tourner du côté de Montreuil. Mais, c’était une autre vie, évacue-t-elle aujourd’hui sans nostalgie. De toute façon, mon métier n’avait rien de très artistique : j’étais là pour bloquer une autoroute ou trouver des cotons-tiges ! » 

Sa nouvelle existence, Florence Sempé, originaire des Yvelines, l’a donc embrassée depuis bientôt quinze ans lorsqu’après son CAP de tournage en céramique, elle se lance pour créer son atelier actuel à Bagnolet et vivre de ses productions. Mais aussi des ateliers d’initiation et de création qu’elle donne du côté de Montreuil avec l’atelier-école de céramique Graines de terre : « La terre m’a vraiment happé, rembobine-t-elle avec quelques années de recul. Désormais, je ne passe plus une journée sans la modeler, c’est quelque chose de presque viscéral… » 

Qui remonte, peut-être, en versant un tantinet dans la psychologie de bazar, à l’enfance : « Si je mets autant de couleurs dans mes créations, raconte-t-elle, c’est, un peu, à cause d’une maîtresse en classe de maternelle qui m’avait interdit de mélanger certaines couleurs au prétexte que ça n’allait pas ensemble. Ça m’avait insupporté et ce souvenir ne m’a jamais quitté ! » 

Un demi-siècle plus tard, elle crée en tout cas comme une grande et surtout comme elle le ressent, travaillant la faïence blanche avant d’y détourner la palette des couleurs selon ses envies. De son nuancier très personnel, elle tire ainsi toute une gamme de tonalités de couleurs pour travailler des décors en sérigraphie ou au pinceau. Avec une gamme de prix allant de 18 à 70 euros. « Je veux créer des choses accessibles à tous », dit-elle fermement.   

A retrouver à La Petite Boutique… 

Tout un art que vous pouvez retrouver au sein de la Petite Boutique de Bagnolet qui regroupe un collectif de créatrices fédéré par l’association « Les aventurières du 93 ». « L’idée de cette association, c’est vraiment de soutenir et d’aider les professionnels des métiers d’art engagés dans une démarche de qualité éco-responsable, en organisant la vente de leurs produits au travers de marchés, d’expositions ou de temps de rencontres. Il y a beaucoup de créateurs et de créatrices qui ont du mal à se montrer en Seine-Saint-Denis, un territoire qui regorge pourtant de talents. » 

Voilà pourquoi, Florence Sempé défend ardemment le label « artisan du tourisme en Seine-Saint-Denis » : « Ce label, c’est aussi une manière de montrer aux plus jeunes ce que sont les métiers d’art, explique-t-elle. Parce que lorsque j’effectue des interventions dans les écoles ou dans des centres sociaux à Bagnolet, ma ville, beaucoup ne savent pas ce que c’est que de mettre les mains dans la terre. Pourtant, c’est quelque chose qui fait un bien fou… » 

L’atelier de Florence Sempé est ouvert toute l’année sur rendez-vous.
En savoir plus
www.laceramiquedeflo.com 

Elsa Robichez, un autre regard sur la création

Prix du Jeune Talent 2023 de l’Artisanat d’Art décerné par la Chambre de Métiers et de l’Artisanat de Seine-Saint-Denis, cette créatrice de bijoux « fantaisie haut de gamme » à Bagnolet assume son côté autodidacte et défend une production 100 % fait main.  

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Fabriquer, créer, inventer, partager… Autant de verbes qui collent à la personnalité et au parcours d’Elsa Robichez, 52 ans, créatrice en 2010 à Bagnolet de la marque « Les Yeux d’Elsa », un « atelier de fabrication de bijoux élégants » qui aime colorer l’existence et l’existant puisque ces collections se construisent autour d’un nuancier de 10 couleurs, qui va de l’or à l’argent noir nacré. LYE, l’abréviation internationalisée de l’atelier made in Bagnolet d’Elsa Robichez, c’est aussi « du 100% français, 100% fait à la main et du 100% fait avec amour », glisse sa créatrice qui manie aussi de l’art de la punch line.  

Un trait extraverti de sa personnalité cultivé d’abord dans le sillage de son paternel, Franck Robichez, marchand d’art spécialisé dans l’art africain et créateur de mobilier en acier.  

« Enfant, je fabriquais des bracelets ou des colliers pour sa boutique, qu’il revendait ensuite au milieu de ses collections. C’est une habitude qui m’est restée par la suite : un peu plus tard lorsque je faisais des babysittings, je continuais à créer des bracelets avec des perles que je revendais à mes copines. Ça me faisait un peu plus d’argent de poche », se remémore-t-elle avec une intonation un brin nostalgique.  

Aragon pour inspiration… 

Des talents créatifs et commerciaux qu’elle ne met pas tout de suite en action puisqu’arrivée à l’âge adulte, elle commence à travailler dans le milieu du cinéma comme assistante de production. Cette fois, c’est l’ascendance et le réseau professionnel de sa mère, scripte, qui fonctionne à plein. « Et puis, avoue sans difficulté Elsa, je n’ai jamais été une grande étudiante même si j’ai quand même obtenu une licence d’histoire de l’art. C’est pour cela que j’ai préféré travailler… » 

D’autres années comme monteuse spécialisée dans le son vont donc suivre avant qu’elle n’embrasse pleinement sa carrière de créatrice de bijoux. Son passé de créatrice juvénile finit en effet par la rattraper : « Je continuais de créer des choses pour moi et pour quelques copines quand un concept-store parisien m’a demandé de lui proposer des bijoux. Seulement, il fallait pouvoir produire des factures, alors je suis devenue une des premières auto-entrepreneuses de France ! »  

Les yeux d’Elsa naissent donc il y quatorze ans : une référence bien sûr à son prénom mais aussi au « poème de l’écrivain Louis Aragon, écrit pour sa femme Elsa Triolet, dans lequel il sublime la beauté de la femme et le regard que l’on peut lui porter », rappelle notre Elsa de Bagnolet, ambassadrice du In Seine-Saint-Denis.  

Créatrice prolifique et reine de la « bidouille » 

La voilà lancée sur ce qu’elle aime le plus : « Créer, parce que j’ai une idée à la seconde », s’enthousiasme-t-elle. Et puis, comme je suis une pure autodidacte, j’aime bidouiller les choses, créer des prototypes que je teste ensuite sur moi. Je passe mon temps à manipuler les métaux, à regarder comment je peux assembler les matières entre elles puisque j’utilise aussi le cuir ou le verre de Murano. » 

Une démarche créative qui laisse également libre cours à son inspiration du moment et à sa passion cinématographique : « Je regarde très peu ce que font les autres, ni même les magazines féminins. En revanche, je visionne beaucoup de films et j’observe ce que portent les actrices et les acteurs. Et puis, mon inspiration, c’est d’abord la rue, ce que portent les gens au quotidien. » 

Une façon de ne pas négliger le quotidien qui la pousse d’ailleurs à ne mépriser aucune branche de son art de bijoutière en lançant dès la fin de ce mois d’avril un service de réparation de bijoux fantaisie au sein d’un lieu de créateurs installé dans le centre commercial Bel Est à Bagnolet (1) : « Ce sera un endroit où on pourra réparer des objets qui ont souvent une grande valeur sentimentale mais que personne ne veut, malheureusement, réparer. » 

De la relativité de la valeur… 

Pas Elsa Robichez en tout cas. Ardente partisane du mouvement « Slow fashion » qui préconise une fabrication respectueuse de l’environnement, la Bagnoletaise, mère de deux adolescentes, veut ainsi redonner vie à toutes les « babioles » qui finissent trop vite à la poubelle : « S’il ne vous reste qu’une boucle d’oreille, je peux en faire une bague, martèle-t-elle avec optimisme. En tout cas, moi, je n’ai aucun problème à réparer des matériaux non nobles parce que la valeur d’un bijou, c’est aussi celle qu’on lui donne : sentimentale, liée à un souvenir ou un moment de votre vie. Surtout, c’est de la matière qui a aussi le droit à une nouvelle vie. » 

Elsa Robichez, qui en a déjà vécu quelques-unes, sait évidemment de quoi elle parle… 

(1) Plus d’infos par mail : retoucherie@lesyeuxdelsa.fr 

Louise Lengagne : chapeau bas pour Madame l’ambassadrice

Installée sur L’Île-Saint-Denis, cet ex-ingénieure s’est reconvertie dans la création de chapeaux et d’accessoires, en créant sa marque en 2019. Également enseignante en arts plastiques dans un collège de Stains, elle milite pour une création éthique et IN Seine-Saint-Denis. Rencontre.  

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Louise Lengagne : chapeau bas pour Madame l’ambassadrice

Modiste et créatrice de chapeaux depuis 2019, Louise Lengagne a fini par assumer professionnellement, la trentaine passée, une passion précoce : « Depuis toute petite, j’ai toujours aimé dessiner et petit à petit je suis venue à la création textile parce que j’avais envie de créer, de produire quelque chose de concret. Et le chapeau s’est imposé parce que je trouve que c’est un accessoire amusant. » 

Ce fut aussi une manière de renouer avec son enfance passée dans le Nord de la France où affleure le souvenir d’un arrière-grand père -Fernand- qui tressait de la paille de blé pour en faire des objets décoratifs. « C’est aussi pour ça que je me suis lancée, en plus du feutre, dans la création de chapeaux de paille, dont l’odeur fait resurgir des souvenirs familiaux. » 

 

Défendre les savoir-faire locaux 

 

De ce chapeau personnel où se mélangent différentes motivations et aspirations va donc sortir la marque Nuance Chapeaux lancée au début de l’année 2019 et aujourd’hui installé dans un  atelier de l’Ile-Saint-Denis : « Un lieu moderne et assez vaste pour accueillir des ateliers d’initiation à la chapellerie où je retrouve beaucoup de passionné.e.s des chapeaux et pourquoi pas, bientôt, un public plus large qui a envie de découvrir tout cet artisanat qui existe en Seine-Saint-Denis et qu’on méconnait un peu. Après tout, l’Ile-Saint-Denis, ce n’est pas seulement le village olympique et la Seine-Saint-Denis, ce ne sont pas que les clichés négatifs que certains médias lui collent en permanence ! » 

Dionysienne d’adoption, Louise Lengagne, ambassadrice du In Seine-Saint-Denis depuis 2020 s’évertue donc à défendre « un territoire qui regorge de savoir-faire avec un réseau d’artisans qui se connait bien. Et c’est vraiment intéressant de le mettre en avant, surtout auprès des jeunes générations, qui ignorent souvent tous de ces métiers d’art qui existent à deux pas de chez eux. Si le label « artisan du tourisme » peut aussi servir à susciter des vocations, ce sera forcément une bonne chose… » 

En ouvrant aussi, pourquoi pas, des horizons à d’autres Séquano-Dionysiens en recherche d’une nouvelle orientation professionnelle. Après tout avant de travailler du chapeau, Louise Lengagne était bien engagée dans une carrière d’ingénieure-architecte : « Je faisais de la gestion de projet aussi bien sur des chantiers de logement que pour de la restauration de bâtiments commerciaux. Une superbe expérience qui m’a amené à travailler en équipe, à gérer des budgets, mais l’état d’esprit créatif me manquait, le travail de la main aussi. Bref, j’avais envie d’autre chose que de rester coincée, la plupart du temps, derrière un écran d’ordinateur à envoyer des mails. »  

 

Également enseignante en collège 

 

En parallèle de son activité professionnelle, la jeune femme née à Calais, ville historique de l’industrie de la dentelle, va donc se trousser une nouvelle vie en obtenant en cours du soir un CAP de chapelière-modiste, tout en suivant aussi les cours des Beaux-arts. De quoi cette fois lui permettre d’ajuster la casquette d’enseignante en arts plastiques au sein du Collège Joliot-Curie de Stains : « Enseigner pour moi, c’est évidemment transmettre des savoirs et partager des connaissances, ce que j’aimais beaucoup faire lorsque je travaillais dans le BTP en accueillant des stagiaires. Je retrouve ça avec les collégiens. Mais, c’est aujourd’hui devenu un peu compliqué de gérer les deux activités de front. » 

Car, en 5 ans d’activité, Nuance Chapeaux a pris du volume et du galon. « Je fais beaucoup de chapeaux sur mesure pour des particuliers, mais aussi des créations originales pour des marques de mode. Ou encore des pièces pour la pub ou même pour un acrobate qui avait besoin d’un chapeau adapté à son activité. Lorsqu’on est acrobate, un chapeau doit être bien emboitant ! » 

Toute une production qu’elle réalise en privilégiant une matière première made In France « même si c’est plus difficile pour la paille qu’on ne trouve globalement qu’en Asie », regrette-t-elle. Et, du côté des accessoires, les rubans par exemple, elle a le plus souvent recours à un autre ambassadeur du In Seine-Saint-Denis, la Réserve des arts installée à Pantin.   

Une manière très locale de signer son appartenance à « Une autre mode est possible » le collectif engagé au service d’une mode écoresponsable. « Créer en respectant les ressources terrestres, des circuits courts de production fait partie intégrale de ma réflexion lorsque je crée une nouvelle pièce, même si c’est difficile à appliquer complètement parce qu’on manque de traçabilité sur les matières premières. C’est un vrai sujet qui n’est pas encore réglé mais sur lequel on avance néanmoins », observe-t-elle.  

C’est, en tout cas, un combat qu’elle compte bien poursuivre, car pour Louise Lengagne, il n’est évidemment pas question d’avaler son chapeau… 

Artisan du Tourisme en Seine-Saint-Denis

Une ouverture sur un territoire de création 

Créé en 2023, le Label Artisan du Tourisme en Seine-Saint-Denis s’est donné l’objectif de faire connaître, auprès du grand public et des touristes, les profils d’artisans œuvrant dans le secteur des métiers d’art et des métiers de bouche.  

En décembre dernier, le Département de la Seine-Saint-Denis, la Chambre des métiers et de l’Artisanat d’Ile-de-France/Seine-Saint-Denis et Seine-Saint-Denis Tourisme ont remis ce nouveau label à une première promotion de 21 artisans du territoire : 10 artisans « métiers d’art » et 11 artisans représentatifs des « métiers de bouche. »  

Parmi les critères de sélection de ces artisans labellisés pendant deux ans, on retrouve l’esprit innovant et créatif, la représentativité du savoir-faire dans son domaine, le choix de privilégier au maximum une production locale. Ou encore la qualité de l’accueil du client.  

En savoir plus sur le label ou candidater sur : www.cma93.fr/fr/artisandutourisme ou par mail artisandutourisme93@cma-idf.fr.