« Ban » les masques aux Magasins généraux !

« Ban » les masques aux Magasins généraux !

Interview croisée entre Eugénie Lefebvre, directrice des Magasins généraux à Pantin et Alexis Delwasse directeur général adjoint du Red Star. Les deux ambassadeurs du IN ont mis en commun leurs forces et leur créativité au service de l’exposition « BAN, VOL.2 ». Un parcours photographique et poétique qu’ils nous présentent en duo. Et c’est à découvrir en mode déconfinement dès ce samedi 13 juin.

Après une première présentation à L’Orfèvrerie de Saint-Denis en 2019, le Red Star LAB et l’exposition BAN sont de retour aux Magasins généraux pour une version enrichie de leur premier opus -lire ci-dessous. A Pantin sur les bords de l’Ourcq, l’expo rassemble cette fois les œuvres de plus de dix photographes, ainsi que les textes et les photographies de jeunes du Red Star Lab autour d’une réflexion simple et complexe à la fois : « Qu’est-ce qu’être au ban, qu’est-ce qu’être à part, à côté d’un monde, à côté des autres ? »

Un évènement enfin déconfiné -puisque l’exposition devait ouvrir en mars à la veille du confinement général- présenté par deux ambassadeurs du IN : Eugénie Lefebvre, directrice générale des Magasins généraux et Alexis Delwasse, directeur général adjoint du Red Star.

Pour commencer, donnez-nous envie, chacun avec votre vision, d’aller sur les bords de l’Ourcq à Pantin pour voir enfin, après trois mois de confinement-déconfinement, cette exposition « BAN, VOL.2 » qui réunit le Red Star Lab et les Magasins généraux ?

Alexis Delwasse. Déjà, c’est une occasion de visiter le site des Magasins Généraux qui est très impressionnant pour celles et ceux qui n’en ont jamais eu l’occasion, et même pour ceux qui le connaissent d’ailleurs. Et puis, l’installation de cette exposition « Ban » est très visuelle, ce qui change d’expositions un peu plus « classiques ». Ensuite, il y a les visions des photographes qui sont très différentes, très riches avec à l’appui des textes qui ont une vraie force. Ces textes écrits par des jeunes, dont on ne soupçonne a priori pas le potentiel d’écriture ou de pensée sont vraiment surprenants. Sans faire offense aux photographes professionnels, il y a aussi des photos qu’on pourrait ne pas imaginer avoir été prises par des jeunes licenciés du Red Star qui ont entre 15 et 17 ans.

Eugénie Lefebvre. Ce qui est très beau dans ce projet « Ban » c’est la dimension à la fois très poétique et esthétique de ce que vous allez pouvoir découvrir aux Magasins généraux. Et en même temps, il y a la dimension sociale et sociétale très poignante des textes à l’appui des photos. Ensuite, il faut venir voir ces grands formats de photos suspendus dans les airs, ce qui donne un côté léger, doux, fragile à l’exposition. Lequel contraste avec une forme de dureté de certains paysages, de dureté dans les regards aussi qu’on retrouve dans pas mal de clichés. Donc, ça donne une alliance particulière parce que le thème de « Ban » est quand même assez dur : on parle quand même de ce que c’est ce qu’être mis au ban, être mis à la marge… Bref, on pourrait rentrer dans une expo un peu raide, dure, un peu historique alors qu’on est vraiment dans une très belle expo d’art contemporain, avec des codes très esthétiques. Et puis, comme l’expliquait Alexis Delawasse, les textes sont très beaux, et très ancrés dans le 93, avec des jeunes qui parlent avec leurs mots, leurs expressions, leur langage… Mais, le mieux plutôt que d’en parler, c’est encore de venir nous voir !

La « dimension sociale et sociétale » de cette expo « Ban », c’est un peu ce qui vous réunit ? Chacun à votre manière, vous faîtes en sorte que le Red Star comme les Magasins Généraux soient impliqués dans cette Seine-Saint-Denis où vous agissez et travaillez ?

Eugénie Lefebvre. Oui, ce qui est sûr, c’est que nous représentons deux structures assez hybrides : d’un côté, le Red Star, club de foot mythique qui avec le Red Star Lab mène un projet d’accompagnement culturel de jeunes qui revient aux origines de la vocation sociale d’un club mais qui est très novateur pour un club de foot. Et puis, nous Magasins généraux, sommes un centre de création fondé et hébergé au sein d’une agence de publicité BETC. Mais, ces deux structures ont, en effet, en commun d’avoir un engagement viscéral sur ce territoire de la Seine-Saint-Denis qui nous réunit. Avec le Red Star, nous avons une forme de conviction de rendre aux acteurs du 93 ce qu’ils nous apportent tous les jours et d’être avec eux dans une forme d’échange.

Alexis Delwasse. Oui, on est dans le même état d’esprit que les Magasins généraux et c’est ce qui nous a donné l’envie de travailler ensemble… J’ajouterai que cette expo est un peu symbolique de ce qu’est le Red Star Lab qui s’est donné pour mission de donner accès gratuitement à la culture aux plus jeunes. Donc, en investissant les Magasins généraux, on agit aussi avec la conviction qu’il faut ouvrir en grand la culture, lever des barrières, enlever des freins…. Et ça, la Seine-Saint-Denis en a, aussi, besoin.

Revenons un peu en arrière : qu’est-ce qui vous a fait vous retrouver en 2018 lors de la première saison culturelle des Magasins Généraux autour du projet « L’Amour du jeu » au moment de la Coupe du Monde de football ?

Eugénie Lefebvre. Lorsqu’on commence en 2018 par une première saison culturelle avec un festival grand public qui a pour thématique le football, un sujet qui parlait à tout le monde lors d’une année de Coupe du Monde, c’était bien sûr une évidence pour nous de proposer quelque chose au Red Star. Mais, nous avions déjà des liens personnels puisque Rémi Babinet le président de BETC et le président du Red Star Patrice Haddad se connaissent, donc nous avons « matché » tout de suite. A l’époque, on avait d’ailleurs invité des footballeurs du Red Star à jouer sur le terrain éphémère que nous avions installé devant les Magasins Généraux : je me souviens même très bien des joueurs et joueuses du club déambulant dans notre exposition sur le foot, encore transpirant de leurs entraînements…

Alexis Delwasse. Nous, du côté du Red Star Lab, c’est aussi notre ADN d’être curieux et d’aller explorer d’autres domaines que le sport. Le Red Star Lab, ce sont des ateliers de radio, d’écriture, d’art, même si souvent ça peut paraître, pour le grand public, un peu bizarre qu’un club de foot fasse « ça. »

Question plus ciblée pour les Magasins généraux, est-ce qu’en 2020 le monde de la culture trouve toute aussi « bizarre » votre alliance avec l’univers du ballon rond ? 

Eugénie Lefebvre. C’est une bonne question… Mais, oui nous assumons de choisir des thèmes très universels comme le football que, peut-être, un petit milieu du monde de l’art va regarder un peu de haut parce que ce n’est, à leurs yeux, pas assez intellectuel ou académique. Pourtant, sur le football, il y a un corpus artistique assez incroyable, dans plein de disciplines que ce soit de la performance artistique, de la vidéo, de la photo, de la peinture, du son… Et cette thématique du foot en appelle plein d’autres parce que parler de foot c’est questionner la société sur le racisme, la place des femmes, la place de la communauté LGBT, la place que l’argent a pris dans ce milieu l’espace des deux victoires françaises en Coupe du Monde, entre 1998 et 2018. Entre ces deux dates, on a aussi changé d’époque et les artistes nous donnent accès à ces mutations du monde, donc ça intéresse les Magasins généraux. Après, oui, je le répète, un petit monde de l’art peut se dire « qu’est-ce que le foot vient faire dans un espace d’exposition ? » Mais, on s’en fiche !

Alexis Delwasse. Oui, c’est vrai, le foot est le sujet de grandes œuvres artistiques. Et nous, ça nous intéresse aussi parce qu’un des grands projets du Red Star, c’est son futur centre de formation qu’on imagine davantage comme un centre de développement où la culture aura toute sa place. Il y a d’ailleurs des jeunes chez nous qui sont un peu « piquouzés » à l’art et à la culture. Alors, même si on a tendance à penser qu’un footballeur ne doit faire que du foot, ne penser qu’au foot, nous, au Red Star, sommes persuadés du contraire. Surtout lorsqu’ils sont jeunes et ont plein de choses à découvrir et à apprendre.

Pour finir, un mot sur votre rôle d’ambassadeur et d’ambassadrice du IN Seine-Saint-Denis, partenaire de « Ban » ?

Eugénie Lefebvre. Notre conviction d’ambassadeur, c’est de s’inscrire sur ce territoire : on ne débarque pas dans une ville et dans un département comme la Seine-Saint-Denis sans un engagement et une envie de participer à ce qui fait ce quartier, cette ville et plus largement le 93. Et puis, la Seine-Saint-Denis est un territoire génial, c’est le département le plus jeune de France avec une dynamique d’innovation, de création qui compose une sorte de fabrique à ciel ouvert, urbaine, sociale, créative et entrepreneuriale. Et c’est aussi le territoire qui sera au cœur des Jeux Olympiques dans quatre ans et, qui à mon avis, écrit en grande partie le futur de Paris. Donc, avec le IN, on a l’impression d’être au début d’une grande histoire !

Alexis Delwasse. Le Red Star est installé depuis 1909 à Saint-Ouen depuis la création du Stade de Paris, devenu Stade Bauer, donc notre implantation en Seine-Saint-Denis est en quelque sorte quelque chose d’« acquis » mais qu’on veut aussi intensifier. C’est pour cela qu’on fait tout pour accentuer notre présence sur le 93 et pas qu’à Saint-Ouen puisque depuis cette saison nos jeunes s’entraînent au sein du complexe de Marville à La Courneuve. Le 93 est de toute façon un vivier de joueurs de football, l’un des premiers d’Europe et du monde et on a l’envie de former ses talents sur leur territoire, afin qu’ils n’aient pas à s’exiler ailleurs en France ou à l’étranger. A côté de ça, le Red Star Lab, c’est aussi l’ambition de révéler les artistes et les créatifs de demain, parce que oui, et c’est aussi pour ça que nous sommes ambassadeurs du IN, nous avons la conviction qu’il faut continuer de porter, encourager la force créatrice des talents de la Seine-Saint-Denis.

Entretien croisé réalisé par Frédéric Haxo
Crédits photo: Hassan Zouhir – Licencié du Red Star


 Ban, vol.2, l’expo à ne pas mettre de côté…

Quand ? 

« Ban, vol.2 » ouvrira ses portes à partir de ce samedi 13 juin et jusqu’au 16 août lors de tous les week-ends d’été de 14h à 20h

Où ?

Magasins Généraux, 1 rue de l’Ancien Canal, 93500 Pantin. Métro Église de Pantin, ligne 5.

Comment ?

Tout est prévu pour accueillir le public dans le strict respect des mesures sanitaires. L’entrée à l’exposition est gratuite et sans réservation. Elle se fait uniquement par l’accès situé au nord du bâtiment côté canal de l’Ourcq. Une jauge maximale de 40 personnes à l’instant T est appliqué dans la salle d’exposition. Une signalétique au sol indique le sens de circulation au sein de l’exposition et un marquage est mis en place en extérieur pour permettre de conserver la distanciation sociale en cas de file d’attente. Du gel hydro-alcoolique sera mis à disposition du public à l’entrée de l’espace d’exposition. Le port du masque pour l’ensemble du public est obligatoire. Des masques à usage unique sont fournis gracieusement au public.

Qui ?

Les artistes présentés sont Tabatini/Alcaide, Louisa Ben, Marvin Bonheur, Lucien Courtine, Léo D’Oriano, Aurélien Gillier, Valérie Kaczynski, Antoine Massari, Anton Renborg, Henrike Stahl, Adrien Vautier. Commissaires de l’expo : Marie Benaych, Henrike Stahl et les jeunes du Red Star Lab.

Plus d’infos : https://magasinsgeneraux.com/fr/expositions/ban