Entreprendre au féminin, c’est In Seine-Saint-Denis que ça se passe !
Parmi les six femmes distinguées en décembre par Créatrices d’Avenir, le programme d’accompagnement de référence dédié à l’entrepreneuriat des femmes en Ile-de-France, quatre font prospérer leurs projets sur notre territoire. A Clichy, Saint-Denis, Aubervilliers ou Montreuil, Myriam, Vanessa, Graziella et Frédérique incarnent le dynamisme du 93, département où l’on crée le plus d’entreprises en Ile-de-France. Focus sur ce quatuor, made In 93.
Graziella Laurenty, prix de la mise en selle
Le Magasin Général du Vélo ouvert en octobre à Aubervilliers, a été distingué dans la catégorie Audace du Trophée Créatrices d’Avenir : un prix qui récompense « une femme ayant créé une entreprise dans un secteur non-traditionnellement féminin. »
A Aubervilliers, tout près de la Porte de la Villette, Graziella Laurenty joue les pionnières depuis octobre grâce au premier magasin de cycles de la ville ouvert depuis des lustres… Signe des temps qui changent, elle installé son « Magasin Général du Vélo » dans une nouvelle rue, piétonne et bien sûr cycliste. « Il y a une forte demande des habitants sur la réparation, sourit-elle tout en contrôlant l’état d’une antique monture ressortie d’une cave. A 34 ans, le vélo est son rayon depuis qu’elle s’est mise au VTT pendant son enfance dijonnaise : « A 13 ans, j’ai pris l’habitude de bichonner mon vélo, de le réparer. J’aimais bien ça… »
Une passion qui l’amènera après une école de commerce à intégrer l’industrie du cycle comme commerciale pour deux grandes marques du secteur. « Du coup, j’ai visité près de 800 magasins de vélo dans toute la France », sourit-elle. De quoi lui conférer une expertise au moment de choisir le lieu d’implantation de sa boutique d’une soixantaine de mètres carré, mais avec du volume sur la hauteur, lui permettant de stocker les nombreux vélos confiés par sa clientèle naissante, en plus des vélos neufs proposés à la vente. Reste maintenant à continuer d’appuyer sur les pédales du développement. Avec le dossard d’ambassadrice du In accrochée en étendard :
« J’ai bien l’intention de m’investir dans la vile et dans le département sur les questions de développement des mobilités douces », revendique celle qui officia un temps au sein des ateliers d’autoréparation de la Cyclofficine de Pantin.
Et, dès qu’on sera bien lancé, je compte lancer des cours du soir d’initiation à la mécanique. Parce qu’ici, on milite pour faire vivre un maximum de temps les mécaniques. C’est pour ça que je déconseille d’aller acheter un vélo au supermarché du coin, venu d’Asie… »
Myriam Fekih, par ici les sorties !
Co-créatrice d’une application dédiée aux bons plans loisirs et sorties, la Clichoise Myriam Fekih a remporté le prix du public des trophées de l’entreprenariat Créatrices d’Avenir.
Avec N’Joy App , une application mobile de bons plans de sorties loisirs, divertissements bien-être ou gastronomie issus d’une sélection de plus de 250 partenaires, la Clichoise Myriam Fekih veut « aller chercher, entre autres, toutes les pépites du 93 afin de donner un accès aux loisirs le plus large possible aux familles qui n’en ont pas forcément les moyens parce que la moindre sortie coûte très chère en région parisienne. »
D’où l’idée déjà expérimentée à Dubaï -où la jeune femme a travaillé à la suite de son Masters en commerce international- de mettre à la portée de tout un chacun des bons plans sur une appli développée sur le principe d’un produit acheté, un produit offert. « C’est comme cela que nous financions toutes nos sorties là-bas avec Araxi Mardirian, ma partenaire dans l’aventure N’Joy, raconte la récente trentenaire. Donc, en rentrant en France, on s’est dit qu’on allait faire la même chose… »
Pari lancé dès l’été 2020 en s’appuyant donc sur son expérience de chargée de partenariats au sein d’une entreprise qui, dans le Golfe, commercialise des coffrets cadeaux. Et, aujourd’hui, l’appli N’Joy est disponible sur les stores au prix de 9,90 euros par mois « remboursés dès votre premier achat sur l’application », précise Myriam Fekih. Laquelle appli fera peau neuve dès le 15 janvier 2022 : « Évidemment, la crise sanitaire nous a ralenti avec une activité de loisirs et de sorties forcément restreinte, mais cela veut aussi dire qu’après pas mal de privations, les gens ont envie de sortir, s’amuser. Et avec des bons plans ! »
Suivie par la Maison de l’Emploi Convergence Entrepreneurs d’Aulnay-sous-Bois, la petite entreprise N’Joy voit donc plus loin et pourquoi pas en s’agrandissant en Seine-Saint-Denis. Myriam Fekih encore :
« Je suis attachée à ma ville de Clichy-sous-Bois, à la Seine-Saint-Denis qui est aussi le département le plus dynamique en termes de création d’entreprises, donc pourquoi pas continuer de mettre à l’honneur les valeurs de l’entreprenariat au féminin dans ce 93 qui bouge bien ! »
Vanessa Fataccy, prise au jeu de l’entreprenariat
Coup double pour la Dionysienne, créatrice du jeu JAMII : elle remporte le Trophée « Quartier» tout en se hissant en haut de l’affiche pour devenir « Créatrice d’Avenir 2021 », soit la lauréate la plus inspirante parmi les 345 sur la ligne de départ.
Née en Belgique, de parents originaires des Antilles, passée un moment par les États-Unis pour suivre un footballeur américain des Flash de la Courneuve, Vanessa Fattacy a eu une vie bien remplie d’autodidacte qui a quitté l’école à 16 ans, a enchaîné les boulots alimentaires et n’a jamais redouté de tenter de nouvelles expériences. « Je suis un peu un couteau-suisse humain, sourit cette mère de famille installée à Saint-Denis depuis 20 ans. Je suis devenue graphiste parce que j’en avais marre de mes boulots alimentaires, photographe parce que je ne trouvais personne pour photographier mes créations de bijoux. Et j’ai même écrit un livre pour apprendre aux garçons à être des « bons-hommes », sachant manier la galanterie… »
Bref, vous l’aurez compris, il ne faut pas titiller longtemps la créativité de Vanessa Fataccy. Aussi lorsque ses deux filles (17 et 7 ans) la questionne sur leurs ascendances, leur histoire et qu’elle ne trouve pas de réponses toutes prêtes, elle crée en 2019 JAMII , le « premier jeu de société pour tous-tes, testant les connaissances sur les cultures générales et populaires Afro à travers le monde. »
Avec l’idée d’en faire un outil de partage fidèle à son nom de baptême puisqu’en swahili, la langue la plus parlée sur le continent africain, le terme signifie « communauté ». Laquelle s’élargit de plus en plus au rythme de 1000 boîtes de jeux déjà vendues dans plus de 70 pays. Un succès que Vanessa Fattacy voudrait maintenant diversifier via la création d’une appli qu’elle compte développer en 2022 lors de son incubation parisienne au sein de la Station F, le plus grand campus de startups au monde. Avec également l’envie de faire vivre son jeu dans cette Seine-Saint-Denis « qui a besoin, plus que n’importe quel autre département, de valoriser son histoire et celle de ses enfants issus d’un peu partout dans le monde. » Ce qu’elle a déjà fait via la présentation et l’animation de JAMII au sein du collège Rosa-Luxemburg d’Aubervilliers ou au cinéma Méliès à Montreuil.
« La Seine-Saint-Denis est riche en absolument tout, conclut-elle. Mais, il ne faut pas que chacun reste dans son coin. Alors, pourquoi pas les réunir, apprendre à se connaitre mutuellement autour du jeu ? »
Frédérique Jonnard, objectif terre à Montreuil
Créatrice de l’atelier Terramano, cette architecte veut sortir du tout béton en réutilisant les terres d’excavation pour construire et rénover de manière écoresponsable. Une initiative qui lui vaut le trophée du « Savoir-faire » de Créatrices d’Avenir.
Lauréate du Trophée « Savoir-faire » récompensant une femme ayant créé une structure mettant à l’honneur « une technique de fabrication, de réparation, de transformation ou de prestation de services relevant de l’artisanat », la Montreuilloise Frédérique Jonnard, 34 ans, a de la suite dans les idées puisque cette architecte de formation est diplômée d’une spécialité architecture de terre au sein du laboratoire CRATerre de l’Université de Grenoble et qu’elle s’intéresse de près à la construction en terre depuis une dizaine d’années, passant même plusieurs mois à s’immerger en terres inconnues lors de fréquents séjours d’études en Amérique du Sud où elle a travaillé aux côtés d’artisans de la terre crue au Pérou et en Colombie.
Ce qui l’amène donc à créer en 2016 à Montreuil, l’atelier Terramano, une entreprise d’écoconstruction spécialisée dans la maçonnerie à base de terre crue et d’enduits à l’argile ou à la chaux, qui forme aussi des artisans et maîtres d’œuvre et réalise du conseil et de l’assistance à maîtrise d’œuvre sur les techniques de construction en terre. Une manière pour Frédérique Jonnard de boucler la boucle puisqu’elle confie bien sûr aimer « bâtir, mais aussi transmettre en équipe. »
Un état d’esprit qu’elle entend continuer d’insuffler en faisant partie du réseau Construire Solidaire , lequel basé à Romainville rassemble des acteurs de l’habitat et de la construction écologique, très ancrés sur le territoire francilien, en particulier en politique de la ville. En 2019, Frédérique Jonnard dirigeait ainsi une formation terre crue « Multi-métier du bâtiment » au sein du Centre de Formation des Apprentis de Noisy-le-Grand pour un public d’adultes en reconversion professionnelle.
Frédéric Haxo
Crédits photo: Créatrices d’Avenir, TerraNova, Njoy, Jamii, Le Magasin Général du Vélo