Lassana Diakité, IN-croyable découvreur de talents

Lassana Diakité, IN-croyable découvreur de talents

À la tête de Nemesis Musik qui produit Keblack, Naza, Kery James ou Youssoupha depuis ses débuts, Lassana Diakité sera un des membres du jury du concours du Go In dédié à la découverte des talents émergents du hip-hop. Une évidence pour le quarantenaire dont le parcours musical a commencé dans le milieu associatif.  

Quand un découvreur de talents rencontre un concours d’émergence de talents, ça ne peut que faire tilt ! Manager d’artistes depuis 2005, Lassana Diakité, qui gère la carrière d’artistes comme Youssoupha, Naza ou Kery James n’a donc pas mis longtemps à s’associer à l’édition 2024 –lire notre encadré– du concours du Go In Seine-Saint-Denis dédié à l’univers du hip-hop.  

« Le Go In, c’est une belle idée parce que c’est un concours qui laisse une grande place à la prise d’initiatives, explique-t-il d’emblée. Les candidats peuvent s’exprimer de la manière qu’ils souhaitent, comme ils le sentent. Ce qui compte surtout pour eux, c’est d’exposer leurs talents. Rien d’autre. Pour moi qui suis producteur et donc forcément toujours à la recherche de nouveaux talents, c’est un concept qui me plaît évidemment beaucoup. »  

Une aventure In Seine-Saint-Denis qui replonge aussi le manager et producteur quarantenaire vers ses plus jeunes années lorsqu’il crée à la fin des années 90 sa première association dans sa ville de Combs-la-Ville en Seine-et-Marne : « J’avais 19 ans lorsque j’ai fondé Combs’inezon, un jeu de mots pour dire qu’on était spécialistes de la danse hip-hop, sourit-t-il. On se retrouvait pour aller danser à Châtelet-les-Halles ou à la gare de Saint-Denis. Et qui dit danse, dit rap : c’était une époque où on croisait souvent des jeunes de Seine-Saint-Denis, de Sevran ou du Blanc-Mesnil lorsqu’on écumait les concours de breakdance. Moi, je n’étais pas vraiment danseur, j’aimais plutôt organiser, réunir des gens. » 

De la banque à la musique…

Une activité qui ne l’empêche pas d’assurer ses arrières via l’obtention d’un BTS dans le secteur électrotechnique, ce qui l’amène à travailler à la Caisse d’Epargne, au service monétique. « Mais, je n’étais pas le mec le plus heureux du monde dans ce boulot », passe-t-il rapidement sur cette période de sa vie.  

Heureusement, la banque mène à tout et parfois à la musique. Un peu comme Claude Moine, garçon de courses au Crédit Lyonnais, devenu le rocker Eddy Mitchell au cœur des sixties, Lassana Diakité quitte, lui, le secteur bancaire pour manager la carrière naissante du rappeur Youssoupha. « C’est vrai que la rencontre avec Youssoupha en 2005 a tout changé, il venait de sortir un premier titre « Éternel recommencement » qui marchait bien, mais il avait besoin de soutien. Alors, on a réfléchi à comment se structurer, j’ai lâché le statut associatif, je suis passé à un vrai métier et on a lancé le label Bomayé Musik. Au fil des années, j’ai appris à gérer toutes les facettes de la vie d’un artiste : les passages en radio, le lien avec les maisons de disques et les médias. » 

Entrepreneur hyperactif, Lassana Diakité s’associe même en 2017 avec Youssoupha pour créer un restaurant de hot-dogs près de la place de la Bastille. Une manière comme une autre de recréer l’ambiance de leurs sessions d’enregistrement à New York où la dégustation de « chiens-chauds » était devenue une tradition partagée.  

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La grande époque des MJC

Bien sûr, la musique reste le cœur de l’activité du duo qui a produit, entre autres, les premiers albums des rappeurs KeBlack (« Bazardée) ou  Naza. Autant de disques d’or qui jalonnent la carrière de Lassana Diakité, qui, ces dernières semaines, s’est attelé aux sessions d’enregistrement du prochain opus de Kery James. Une réussite qui n’empêche pas le manager d’artistes de se retourner avec humilité sur son parcours : « Je n’oublie pas que tout est parti d’une passion pour le hip-hop et le break qui est née entre potes. Je me rappelle encore d’ailleurs les cassettes vidéos de concours de break venues des USA qu’on se repassait entre nous. On les trouvait hyper forts, avant de découvrir que l’enregistrement était, en fait, en mode légèrement accéléré ! » C’était aussi la grande époque des MJC en banlieue, on essayait de créer des liens entre elles, de se rapprocher entre différents coins de banlieue, mais ça ne marchait pas toujours… » 

Tout un itinéraire qui l’a aussi aidé à se construire et qui l’incite à prodiguer ses conseils aux plus jeunes dès qu’il le peut : « J’interviens assez souvent lors de masterclass sur l’entreprenariat dans la musique où j’explique d’abord que le premier kiff, c’est d’être dans la création mais que ça n’empêche pas d’apprendre à être des entrepreneurs. Avec l’arrivée du digital, la musique s’est développée différemment et il faut savoir un peu tout faire, estime-t-il. Mais, dans mon cas personnel, j’ai appris de mes erreurs. Il y a quelques années, devoir m’occuper de TVA ne me venait même pas à l’esprit… » 

Le 93 aux racines du rap

Autant d’écueils possibles dans une carrière musicale dont il préviendra sûrement les futurs talents repérés dans le cadre du prochain concours du Go In. Un événement qu’il attend avec envie et beaucoup de curiosité : « Il faut que le 93 retrouve un peu son côté développeur de talents et de stars, clame-t-il. Parce que j’ai l’impression qu’en ce moment, il y a moins de choses qui se passent dans un département où le rap a quand même pris ses racines avec NTM. Mais, c’est comme dans le foot, il y a parfois des trous dans les générations. En tout cas, le concours du Go In existe aussi pour que les talents cachés s’expriment… » 

Pour le reste, Lassana Diakité saura leur faire la bonne passe !  

Frédéric Haxo
Photos : Bruno Levy

Go In Seine-Denis : le concours est toujours ouvert…

Le IN Seine-Saint-Denis et l’association Culture de banlieue ont lancé, le 15 mai dernier, le concours « Go In Seine-Saint-Denis » sur le thème du hip-hop afin de célébrer les 40 ans de cet art en France. Un concours en mode freestyle puisque les candidats sont invités à soumettre leurs propositions artistiques sous n’importe quelle forme (vidéo, écrit, croquis…). L’objectif : révéler les talents émergents de la culture hip-hop In Seine-Saint-Denis et ensuite les accompagner. Alors à vous de jouer puisque les candidatures sont ouvertes jusqu’au 20 juillet 2024 et pour en savoir plus, ça se passe par ici !