Lauréate Appel à Agir In Seine-Saint-Denis: Bienvenue à la MA1SON !

Lauréate Appel à Agir In Seine-Saint-Denis: Bienvenue à la MA1SON !

Depuis 2014, l’association Article 1, lauréate de l’Appel à projet Agir In-Seine-Saint-Denis, accompagne des étudiants boursiers dans des projets qui font bouger leurs territoires de résidence. Focus sur trois lauréats de la dernière saison du programme MA1SON pour qui tout est parti de Saint-Denis.

Née en 2018 de la fusion de deux associations de lutte contre l’inégalité des chances -Frateli et Passeport Avenir- Article 1 œuvre au quotidien « pour une société où l’orientation, la réussite dans les études et l’insertion professionnelle ne dépendent pas des origines sociales, économiques et culturelles. » Et ce n’est pas qu’une belle formule puisqu’à travers un programme annuel intitulé MA1SON, Article 1 -lauréate de l’appel à projet Agir In-Seine-Saint-Denis- soutient et encourage des étudiants boursiers dans le montage de projets solidaires en matière d’écologie, de consommation responsable, de lutte contre les discriminations. Avec l’objectif très concret d’avoir un impact social positif sur la ville ou le quartier où vivent les étudiants des communautés MA1SON installés dans cinq résidences étudiantes franciliennes, dont deux en Seine-Saint-Denis à Aubervilliers et Saint-Denis. Entièrement gratuit et inspiré du modèle anglo-saxon des « living-learning communities », MA1SON accompagnera lors de cette nouvelle année universitaire 159 étudiants boursiers prêts à marcher sur les traces de leurs aînés puisque le programme existe déjà depuis 2014. Cinq années d’énergies mises en commun et des résultats palpables racontés pour le « In » par un trio de lauréats de la dernière saison de projets. Trois « aventures » très différentes qui ont en commun d’avoir pris leur élan depuis la résidence Camille-Sée de Saint-Denis.

« Intégrer MA1SON, c’est faire vivre une communauté d’esprit »

Dynamiter les inégalités sociales en soutenant les jeunes talents dans les quartiers populaires, c’est l’ambition « canonnée » par l’association des « Maudits Pirates ».

A l’abordage dans le combat contre les inégalités sociales, on trouve les Maudits pirates, association portée par un duo frère-sœur, Walid et Sherianne Bekhti, 23 et 24 ans. « Avec Maudits Pirates, il s’agit à la fois de mettre en avant l’espèce de fatalité à laquelle doivent faire face les jeunes issus de milieux populaires et cette malédiction socio-économique qui prédispose et nous condamne à l’échec. La piraterie est justement là pour illustrer notre quête audacieuse de liberté et de richesse, pas seulement matérielle », développe Sherianne, chercheuse en sciences sociales. Un nom de baptême qui est aussi un clin d’œil aux origines algériennes des Bekhti : l’Algérie ayant longtemps été une terre de pirates. Mais, le terrain que veut aujourd’hui explorer, Maudits pirates, c’est celui de la culture. « L’idée c’est de prendre des risques d’avoir de l’audace pour faire émerger les créateurs de demain, donc être aussi un soutien pour les jeunes issus de quartiers populaires et des minorités. Un « esprit pirate » qu’ils ont d’abord commencé à essaimer en aidant des jeunes artistes comme Josué Comoe, peintre grandi à Rosny-sous-Bois, à trouver des espaces d’exposition. Une action qui s’est prolongé ensuite dans le 7e art, nouvelle corde à l’arc de Walid Bekhti, déjà diplômé d’un Masters de finances publiques avant d’enchaîner avec une école de cinéma -la Fémis- où il est étudiant en 3e année. « Le réalisateur Ladj Ly nous a par exemple sollicité l’an dernier pour accompagner les auteurs de son école de cinéma Kourtrajmé à Clichy-sous-Bois », raconte Walid.

A l’abordage de nouveaux rivages…

Devenus en cette rentrée 2019, ambassadeurs du programme MA1SON, Walid et Sherianne vont maintenant aider les nouveaux étudiants à initier leurs projets. En faisant sûrement souffler, dans le bon sens, le vent de révolte qui les anime. « MA1SON a été l’occasion de rencontrer des gens avec des profils similaires aux nôtres, de nouer une communauté d’esprit pour que puissent être mieux représentés dans la société les gens qui nous ressemblent, que la question des inégalités soit portée sur le devant de la scène », expose ainsi le natif de la banlieue de Saint-Etienne, grandi dans un milieu « modeste mais bienveillant » avec un père surveillant pénitencier et une mère assistante familiale.

Enfin, MA1SON, ce fut aussi pour Walid Bekhti, la rencontre avec Saint-Denis, ville de sa résidence étudiante : « Un endroit dont je ne peux plus me passer, glisse-t-il. Une ville où contrairement à Paris où j’ai vécu, on peut encore se rencontrer. » Tout le scenario d’ailleurs d’une histoire d’amour entre Moussa vigile de la Basilique de Saint-Denis et Lucie, pensionnaire de la très « select » Maison d’éducation de la Légion d’honneur, qu’il achèvera de produire à l’horizon 2020. Un court métrage écrit par Ketty Luntala, jeune cinéaste dyonisienne, qui n’est d’ailleurs qu’un des projets en cours des Maudits pirates en quête de nouveaux rivages à aborder : « Comme notre vocation est vraiment de soutenir les jeunes talents, de rendre visible les minorités, on a également l’envie d’organiser des ateliers-théâtre dans les quartiers », prévoit déjà le duo des Bekhti. Toujours sabre au clair les Maudits pirates !

« Une expérience utile socialement »

Étudiant en mathématiques, Zakaria Brahimi s’est investi dans un projet de jardins partagés dans le quartier Confluence à Saint-Denis.

Lorsqu’il a quitté l’Algérie pour rejoindre Saint-Denis et la résidence universitaire Camille-Sée en 2017 afin de poursuivre son cursus étudiant en masters de mathématiques à l’Université Paris-6, Zakaria Brahimi a tout de suite vu dans le projet MA1SON d’Article 1 un moyen d’intégration rapide à son nouvel environnement. Associé à trois autres étudiants de la résidence, il s’est ainsi rapidement impliqué dans « la construction d’un projet de jardins partagés dans le quartier Confluence. » Une expérience « utile socialement et personnellement », juge-t-il avec le recul. « On a surtout apporté notre concours sur la communication du projet via les réseaux sociaux, poursuit le Dionysien d’adoption, c’était une aide modeste à notre échelle mais une occasion formidable de rencontrer des personnes, des associations qui sont impliquées dans la vie de notre quartier. Bref, on a établi des liens et je suis déjà partant pour m’insérer dans d’autres projets locaux lors de la prochaine session de MA1SON. »

Et, l’été n’a pas non plus tari sa soif de découvrir Saint-Denis autrement : «MA1SON, c’est aussi une excellente façon d’avoir un vrai aperçu sur l’énergie et la vitalité associative d’une ville. Au fil des projets qui se montent, j’ai pu me rendre compte que Saint-Denis bougeait beaucoup de ce point de vue-là. Cela colle bien avec l’esprit MA1SON qui est un tremplin pour mieux connaître son environnement et ses voisins, faire vivre également la résidence de manière intelligente avec les gens qui l’entourent. A Paris, j’ai beaucoup d’amis étudiants ou étudiantes qui me racontent qu’en fait personne ne se connaît au sein de leurs résidences. A Saint-Denis, nous nous connaissons quasiment tous ! »

« J’ai beaucoup plus appris avec MA1SON que lors de mes années d’école »

Avec sa chaîne de podcasts Stronger, le Bagnoletais Noam Sinseau veut faire entendre toutes les différences.

Monter le son sur des thématiques de société, c’est l’objectif de « Stronger », une chaîne de podcasts audios dont le slogan claque comme un étendard : «Stronger fait le Poing! sur la diversité et la tolérance. » Lancée par Noam Sinseau, étudiant en licence d’info-com à Paris-13 Villetaneuse dans le cadre du programme MA1SON en 2017, la chaîne est née d’une discussion à bâtons rompus entre étudiants, se souvient son créateur : « On était un groupe de quatre, on ne savait pas vraiment sur quel projet partir et puis on s’est regardés, on était deux femmes et deux personnes « non blanches ». Alors, je me suis dit et on s’est dit : « Parlons de nos « différences » et de la manière dont on les vit ! » Moi, personnellement, je suis Antillais et gay et j’avais envie de parler de ça… » Une manière aussi pour celui qui se « verrait bien journaliste » d’affiner sa maîtrise du podcast -« de la radio à notre façon »- et de développer en même temps « sa capacité à parler en public et à s’exprimer sur des sujets pointus. » Résultat, via MA1SON qui lui a permis sur sa chaine diffusée sur Instagram et Soundcloud de collecter des « témoignages inspirants » sur les questions de l’homophobie et du racisme ordinaire, l’ex-élève en DUT Techniques de commercialisation estime « avoir beaucoup plus appris que lors de (ses) années d’école. » De quoi donner au prix «Ne reste pas à ta place » du programme MA1SON 2018-2019, l’envie de se lancer désormais dans la réalisation d’un « documentaire scénarisé sur la vie d’une personne transgenre. » Un projet que Noam Sinseau n’hésitera pas à appuyer sur le réseau solidaire du In-Seine-Saint-Denis parce que, juge le jeune producteur de podcasts, c’est « un territoire où on peut vraiment porter la dynamique et les voix d’une société qui évolue… »

 

Textes Frédéric Haxo, photos DR.