Ambassadrice In Seine-Saint-Denis: Ariane Leblanc, jardinière du lien social
Coordinatrice du projet La Semeuse au cœur de la structure artistique Les Laboratoires d’Aubervilliers, l’ambassadrice du In Seine-Saint-Denis Ariane Leblanc utilise un jardin expérimental et façonné à son image pour créer du lien et développer le dialogue social entre les habitant.e.s autour du végétal.
Coordinatrice du projet La Semeuse au cœur de la structure artistique Les Laboratoires d’Aubervilliers, l’ambassadrice du In Seine-Saint-Denis Ariane Leblanc utilise un jardin expérimental et façonné à son image pour créer du lien et développer le dialogue social entre les habitant.e.s autour du végétal.
Sous la pergola dans la cour des Laboratoires, en plus de deux poules qui gambadent, un groupe d’hommes tape le carton dans cet environnement champêtre et paisible, tranchant avec le bitume du quartier, à quelques encablures de la station du métro 7 aux 4 Chemins. Ariane Leblanc les prévient qu’elle aura besoin de l’espace le lendemain pour accueillir un groupe. Pas de problème, ils céderont la place pour que leur havre de paix deviennent un jardin pédagogique le temps d’un atelier autour des graines et de l’alimentation.
Ariane Leblanc a le contact facile et semble avoir tissé des liens de respect avec ces voisins du quotidien. Celle qui est née en 1993 à Paris d’une famille issue du métissage (sa grand-mère vit toujours au Sénégal), a passé son enfance et adolescence au Pérou et au Brésil où son beau-père était attaché culturel et sa mère commissaire d’exposition, aussi impliquée dans une association de lien social. De cette enfance en Amérique latine, elle a gardé le goût des voyages et des rencontres. De Sao Paulo, elle se souvient de l’organisation de la ville tout en vertical, en ghettos et comment la traite négrière sur laquelle s’est construit le pays a laissé des traces :
« au Brésil, plus tu as la peau noire, plus tu es pauvre ! ».
Aujourd’hui elle se passionne pour les questions coloniales et post-coloniales, des racines et du déracinement. Adepte du woofing (Willing Worker On Organic Farms ou travailleur bénévole dans une ferme d’agriculture biologique), son rapport à la terre est intense, elle qui a toujours vécu en centres urbains (Lima, Sao Paulo, Rennes ou Paris).
Ariane est la quatrième personne à gérer la Semeuse dans la continuité des coordinateurs précédents mais avec sa propre vision de ce projet artistique de recherche traitant du vivre-ensemble au travers de la biodiversité.
« A mon arrivée, j’ai été frappée par la diversité culturelle d’Aubervilliers …
… Or les graines et les plantes voyagent tout autant que les humains. Ce jardin est un espace où la population et la biodiversité peuvent se rencontrer avec du troc de graines, des échanges de savoir-faire, des rencontres autour du jardinage »…
Outil de sensibilisation, le jardin de la Semeuse fonctionne aussi bien pour les écoles, les centres sociaux, le public en décrochage scolaire, en situation de handicap ou en insertion professionnelle. Au cours des ateliers, des enfants racontent avec des mots innocents leur propre rapport à la terre en se souvenant de leur pays d’origine. Pour Ariane, la fracture sociale commence dès le plus jeune âge.
« L’idée est qu’ils prennent l’air mais pas que. Je parle beaucoup d’eux et leur montre que la biodiversité est vivante comme nous et qu’il faut en prendre soin. Certains expliquent comment on cultive la terre au pays : « chez moi on fait comme ça !» et me montrent leur technique. Connaître la culture de l’autre à partir de choses simples pour mieux se comprendre est aussi un des objectifs de ces ateliers. »
Le déracinement vaut pour les plantes comme pour les êtres humains. Quand en collaboration avec le centre social de la Maladrerie, elle organise une « disco soupe » autour des fruits et légumes invendus avec des femmes qui font le ménage dans leur cité, l’enjeu n’est pas simplement de cuisiner pour 0 euro en évitant le gaspillage. Pour ce projet, il s’agit surtout pour ces immigrées originaires d’Afrique, d’Europe de l’Est, du Sri Lanka etc. qui vivent au même endroit sans se connaître, de se rencontrer et d’échanger malgré la barrière de la langue . Et quoi de mieux que la nourriture de son pays pour partager de la convivialité avec des musiques rapportées par chacune pour ponctuer ce moment de fête !
Récemment, Ariane Leblanc a rejoint la communauté des ambassadeurs et ambassadrices du In-Seine-Saint-Denis :
« J’aime bien la Seine-Saint-Denis, il y a de super projets alors que ce n’est pas le département le plus riche et il y a beaucoup de mixité …
… Avec le Grand Paris, tout cela va se faire englober et je trouve aussi important de défendre un département de gauche… Même si tout n’est pas rose, je préfère être dans un coin comme Aubervilliers où on valorise mes initiatives qu’ailleurs… Être ambassadrice, c’est aussi une manière de créer un réseau intéressant en Seine-Saint-Denis pour La Semeuse, rencontrer des gens…et de porter mes idées de façon différente… »
Les initiatives en cours à La Semeuse se multiplient comme celle autour de l’Interstice avec ses friches investies par des artistes qui attestent d’une histoire industrielle forte mais aussi d’une biodiversité sauvage locale souvent ignorée et vouée à la destruction.
Pour découvrir la structure des Laboratoires, une visite du jardin de la Semeuse s’impose puisqu’il est ouvert à toutes et tous du lundi au vendredi (de 10h à 18h) avec son compost à disposition des Albertivillarien.ne.s. Et vous y croiserez forcément Ariane Leblanc !
Sandrine Bordet