Avec la Miel, tout le sel de l’entreprenariat In Seine-Saint-Denis

Avec la Miel, tout le sel de l’entreprenariat In Seine-Saint-Denis

Retour sur la 3e édition du concours de pitch de la Miel ouvert aux entrepreneurs émergents du 93 qui avait lieu le 31 mai au Mob Hôtel de Saint-Ouen. L’occasion pour des projets naissants de mieux se faire connaître. Focus sur les deux lauréats « Sis.Terre » par Christine Traoré et « Last Market » imaginé par Rodrigue Balogue.

Quelques voix qui chevrotent, une pincée de trous de mémoire, mais aussi beaucoup de discours convaincus et convaincants, voilà, en résumé, l’ambiance du concours de pitch organisé par la Miel, autrement dit la Maison de l’Initiative Économique Locale , le 31 mai dernier au Mob Hôtel de Saint-Ouen . Sur la ligne de départ de la 3e édition de ce concours, neuf projets d’entrepreneurs et d’entrepreneuses dans les catégories « amorçage » et « développement ». Avec deux lauréats à la clé, soutenus à hauteur de 1 000 euros par la Miel qui depuis 1998 apporte son expertise à la création et au développement d’entreprises sur le territoire de Plaine Commune.

Au Mob Hôtel, Rodrigue Balogue et Christine Traoré avaient une minute pour convaincre. Le IN Seine-Saint-Denis, fidèle à son sens du partage, leur a rajouté quelques lignes « d’extra-time » pour mieux faire connaissance.

Portraits.


Christine Traoré, les pieds sur Sis.Terre

Avec son programme « Sis.Terre », cette trentenaire installée à Saint-Denis ambitionne d’intégrer les « enjeux sociaux et environnementaux dans les modèles d’affaires. »

Quand le monde ne tourne pas rond, Christine Traoré veut le remettre les pieds sur Sis.Terre… Sis.Terre, de « sistere » qui signifie « se tenir debout » en latin est son actuelle petite entreprise aux grandes visées née du côté de Dakar. Entre 2016 et 2018, cette Dionysienne d’adoption vit en effet au Sénégal et après plusieurs mois en poste au sein d’une grande agence en conseil en communication et marketing, elle s’immerge dans le monde de l’économie circulaire. La suite, cette trentenaire, diplômée en communication de l’École parisienne du Celsa nous la raconte : « Ce jour-là à Dakar, j’effectuais dans le cadre d’une conférence sur l’économie circulaire en Afrique, la visite d’une usine flambant neuf de recyclage de déchets. Un site qui retraitait en fait des déchets venus d’Europe… Et pour construire cette usine, on avait rasé un champ de 300 baobabs centenaires ! En fait, c’est ce moment absurde qui m’a amené à enclencher une réflexion et une quête pour comprendre comment on en était arrivés là… »

Moralité, Sis.Terre germe donc sur un champ de baobabs sacrifiés : « L’objectif de mon projet est d’accompagner les acteurs et décideurs des mondes économiques et politiques à mettre en place des solutions pour déployer une économie plus résiliente. D’où l’idée de créer un programme permettant d’intégrer les enjeux environnementaux et sociaux au sein des modèles d’affaires. Par exemple, lors de la mise en place d’un contrat d’assurances habitation, on peut inciter la personne qui souscrit à ce contrat à changer ces pratiques au sein de la maison pour consommer moins d’énergie, moins d’eau. Et donc, le point d’entrée de Sis.Terre, c’est de se dire que toutes les entreprises générant des services ou des produits peuvent se donner les moyens de changer leurs pratiques pour contribuer, aujourd’hui, aux enjeux de demain, en matière de développement durable et d’économie contributive. »

Un territoire vivant pour des entrepreneurs innovants

Un concept que Christine Traoré, soutenue par la Miel s’applique désormais à faire décoller. « Pour le moment, je suis en phase d’études avec mes quatre premiers clients, des PME qui évoluent dans le monde du service », dévoile-t-elle. 

Un combat économique et philosophique que la jeune femme est résolue à mener le plus loin possible. Motivée, elle s’est ainsi installé à Saint-Denis en 2019 pour reprendre le cours de ses études en bouclant un Mastère spécialisé en Management global du développement durable au sein de Mines Paris Tech et un Master 2 en Prospective, innovation et transformation des organisations au sein du Conservatoire National des Arts et Métiers.

De quoi s’armer pour sa vie d’après. Qu’elle voie largement en Seine-Saint-Denis, un territoire dont la jeune femme grandie entre l’Afrique et la Charente Maritime apprécie « l’émulation culturelle et le grand dynamisme économique. Un territoire vivant, en fait, qui porte les entrepreneurs innovants. »

Accompagnée par la Miel depuis 2021, la jeune femme ambitionne désormais de passer à la vitesse supérieure : « L’enjeu pour moi est de développer le programme Sis.Terre, j’ai vraiment envie d’aider les marques à repenser leurs modèles d’affaires. Et, beaucoup sont d’ailleurs installées en Seine-Saint-Denis, donc je « jouerai » presque à domicile… »


Rodrigue Balogue, recyclé c’est gagné avec Last Market

Du côté de La Courneuve, cette TPE créé par cet ex-spécialiste de la logistique redonne vie à du matériel informatique. Objectif : créer une filière d’emploi autour des activités de reconditionnement.

« La fin n’est plus la fin, la fin est un nouveau départ. » Voilà la punchline gagnante du pitch de Rodrigue Balogue lors du concours de la Miel. Un argumentaire simple pour expliquer le concept de Last Market , son entreprise « spécialisée dans l’achat, la vente, le reconditionnement et la négoce de produits high-tech nomades. » Du côté de La Courneuve, le duo de techniciens de Last Market teste, répare et reconditionne du matériel informatique, de téléphonie ou encore des trottinettes électriques. « L’idée, résume l’ex-Montreuillois et néo-Courneuvien Rodrigue Balogue, c’est de faire aujourd’hui avec ce qu’on a. Donc plutôt que jeter, il faut exploiter et réutiliser les ressources existantes pour le bien de la planète et des générations futures. Aujourd’hui, l’économie circulaire doit être un objectif majeur et c’est ce qu’on défend avec Last Market ! »

Une idée que ce tout juste quadragénaire a nourri, entre autres, lors d’un passage au sein du service après-vente d’un fabricant d’électroménager. Dans une autre vie, il a aussi été employé pendant une dizaine d’années pour un grand groupe de la logistique avant de subir les conséquences d’un plan social en 2017.

Des idées, des projets des talents made In 93

Qui fut finalement le moment de son rebond puisque Rodrigue Balogue en profite alors pour reprendre des études et décrocher, entre autres, en 2019 un Master 2 en management et en développement des sociétés. Un marchepied pour se lancer dans l’aventure Last Market, soutenu et conseillé par la Miel. « Un soutien hyper-important lorsqu’on se lance dans l’entreprenariat et qu’on est forcément un peu isolé au départ. Au contraire avec la Miel, on a un soutien et des conseils permanents. Et puis, surtout, on peut bénéficier de la force de son réseau. Surtout en Seine-Saint-Denis où il y a des talents, des idées et des projets à revendre. »

D’ailleurs Last Market a déjà établi un partenariat avec la Miel pour équiper les locataires de sa pépinière d’entreprises de La Courneuve en matériel informatique reconditionné.

Et, lors de la prochaine rentrée, la TPE de Rodrigue Balogue élargira son offre en ouvrant une boutique grand public, toujours à La Courneuve : « On fera bien sûr du reconditionné, mais on revendra également des lots de matériel qui n’ont pas eu le succès escompté en distribution classique. Tout un tas de produits qui peuvent encore trouver acquéreurs à des prix moindres surtout dans une période où le pouvoir d’achat est menacé par les différentes crises. A côté de cela, on continuera à travailler avec les PME qui, par exemple, veulent se débarrasser et recycler leur parc informatique vieillissant. L’objectif, c’est donc de grandir, tout en formant localement aux métiers du reconditionnement, parce que c’est une voie d’avenir. »

Un avenir que Rodrigue Balogue, roi du pitch, trace évidemment en Seine-Saint-Denis : « Tout simplement parce que comme le chante si bien NTM, la Seine-Saint-Denis, c’est de la bombe bébé ! »

 

Frédéric Haxo

Crédits photo: Larha Magassa