A la Cité fertile, une École buissonnière made In Seine-Saint-Denis qui sort des sentiers battus…

A la Cité fertile, une École buissonnière made In Seine-Saint-Denis qui sort des sentiers battus…

Agricultrice urbaine et youtubeuse Ophélie Damblé a fondé « l’École buissonnière» à Pantin : une série d’ateliers qui remet les mains des urbains dans la terre. Au point qu’ils et elles jouent à leur tour les semeurs et semeuses de -bonnes- graines. Découverte.

Un dernier coup de balayette « magique » sur la grande table nichée dans sa serre de la Cité Fertile à Pantin et Ophélie Damblé, fondatrice de « Ta mère nature » -lire aussi notre encadré- s’éclipse pour laisser place à la dizaine de stagiaires de l’École buissonnière. En partenariat avec l’association des Amis de la Cité fertile, l’autrice de Guerilla Green. Guide de survie végétale en milieu urbain a lancé au printemps ce concept d’apprentissage du b.a.-ba de l’agriculture urbaine et du jardinage à destination d’habitants de la Seine-Saint-Denis : une manière décontractée et gratuite de remettre les mains dans la terre pour tout un groupe d’ « urbains ».

Des « cours » tout en décontraction mais avec cependant une règle stricte et fixe : que les stagiaires de l’École buissonnière puissent en fin de formation « transmettre leurs apprentissages à travers des ateliers animés par leurs soins », expose la trentenaire Ophélie Damblé qui a posé, en 2019, sa serre pédagogique et sa chaîne YouTube au sein du tiers-lieu pantinois, ex-gare SNCF de marchandises qui sera bientôt un nouveau quartier aux portes de Paris.

Ophélie Damblé durant la soirée des lauréats de l’appel à projets In Seine-Saint-Denis 2023 au Point Fort d’Aubervilliers

Trèfle, radis et fenouil…

Un concept pédagogique qui vient donc à floraison, ce samedi de fin septembre, avec aux manettes Deborah, comédienne engagée dans une toute nouvelle carrière dans la naturopathie. Le jour de la visite du In Seine-Saint-Denis, c’est en effet à son tour de prendre les rênes d’un atelier très pratique : « Comment faire pousser des graines germées et des micro-pousses », introduit-elle très à l’aise devant une dizaine d’élèves.

Une petite heure donc à deviser, expérimenter, montrer comment on peut faire pousser radis, fenouil ou trèfle. Pour le néophyte, c’est technique mais très simple en pratique puisqu’on parle des bons réflexes pour sélectionner les graines, du type de terreau à privilégier, de la température idéale pour la germination…

Bref, du concret et du palpable. « Ce que je cherche surtout à faire, c’est (re)donner le goût et l’envie de faire des choses à des personnes qui veulent passer à l’action, jardiner sur leur balcon, dans leur cour, dans leur jardin », explique Deborah. De toute façon, c’était le « deal » conclu avec Ophélie lorsque je me suis engagée dans ses ateliers : il fallait que je sois capable de transmettre une partie de ce que j’avais appris à ses côtés tout au long du printemps. Pour moi, c’est aussi une belle manière de se rencontrer et de s’impliquer dans un projet qui a du sens. »

Atelier Graines Germées à la Cité Fertile, animé par Deborah

« Faire attention à la planète »

Une façon unique aussi de semer des graines d’agriculture urbaine en Seine-Saint-Denis. « C’est vraiment ce que je voulais lorsque j’ai commencé à réfléchir à ce projet, sous-titre Ophélie Damblé, ne pas me poser en « sachante » et au contraire laisser les participants et participantes de l’École buissonnière prendre les choses en main. A leur manière… »

Une méthode qui a « bluffé » Valentin, 18 ans. Montreuillois et étudiant en BTS aménagement paysager au sein de l’école parisienne d’horticulture du Breuil située dans le bois de Vincennes, le jeune homme a rejoint l’École buissonnière « d’abord parce que je suivais la chaîne Youtube d’Ophélie Damblé. J’avais envie de découvrir ce qu’elle faisait ici à Pantin. Et vraiment, je ne regrette pas tout le temps passé à la Cité fertile : on apprend plein de choses sur le jardinage dans un esprit collaboratif et on est loin de l’ambiance ennuyeuse d’un cours magistral. Franchement, le concept de cette école est génial et on devrait l’élargir à toute la Seine-Saint-Denis. C’est de la vulgarisation dans le bon sens du terme, sans les termes savants qui font fuir les gens et c’est aussi une bonne manière d’aller vers le monde qui nous attend demain où on devra, enfin, faire attention à la planète et à nos ressources naturelles. » 

Des boutures dans tous les sens…

Sous un soleil qui cogne dur en cette fin septembre, Valentine -quand le hasard décide d’être malicieux- confirme les propos de Valentin. Sans hésitation. « Personnellement, j’étais le type même de celle qui n’avait pas du tout la fameuse « main verte », raconte cette illustratrice et enseignante en maternelle à Aubervilliers. Régulièrement, je faisais mourir mes plantes dans mon appartement, alors je me suis dit qu’il fallait, peut-être, faire quelque chose… C’est comme ça que j’ai découvert Ta Mère Nature et Ophélie sur le web et que je suis arrivée ici ! »

Arrivé et surtout repartie convaincue par les méthodes en douceur de cette école d’un autre genre : « J’ai appris et compris énormément de choses nouvelles, ce qui me donne envie, maintenant, de faire des boutures dans tous les sens, sourit-elle. En fait, ces ateliers sont une superbe expérience qui fait énormément de bien dans un environnement très urbain comme la Seine-Saint-Denis. Ça prouve aussi qu’au milieu du béton, il y a de la place pour mettre un peu de vert et mieux se nourrir sans avoir recours à des produits transformés. Et puis, j’ai fait plein de rencontres très enrichissantes humainement. Du coup, on a tous très envie que l’École buissonnière ne s’arrête jamais ! »

Article : Frédéric Haxo
Photo : Bruno Lévy