Covid 19: des masques made in ambassadeur.ice.s In Seine-Saint-Denis

Covid 19: des masques made in ambassadeur.ice.s In Seine-Saint-Denis

Depuis fin mars, le réseau des ambassadeurs et ambassadrices s’est mis en action pour soutenir ceux qui sont confrontés au quotidien au coronavirus. En quelques jours, une chaîne de solidarité a permis de créer plus de 500 masques anti-projection à destination d’associations qui font de la livraison de colis ou de la distribution d’aide alimentaire. Des « maillons » de cette opération solidaire nous racontent le scenario d’une mobilisation IN-édite.

« La démonstration de la force active du réseau des ambassadeurs »

 

 

Nadine Gonzales, directrice de la Casa 93, école de mode alternative.
« Dès que le IN nous a sollicité pour fabriquer des masques, les élèves de nos différentes promos comme leurs professeurs ont voulu rejoindre le mouvement. Pour les élèves, c’était aussi un prolongement naturel des missions solidaires qu’ils mènent tout au long de l’année auprès d’associations ou encore dans certains collèges de Seine-Saint-Denis où Casa 93 intervient pour des ateliers de sensibilisation à la mode éthique et à l’art de l’upcycling des vêtements. Ensuite, pour nous qui travaillons déjà avec d’autres ambassadeurs du In comme Mode Estime à l’Ile Saint-Denis, cette action de fabrication de masques est la démonstration de la force active du réseau du In Seine-Saint-Denis. D’ailleurs, nous sommes déjà prêts à nous réengager dans l’assemblage d’autres masques après notre première livraison de quelques 200 masques : nos élèves sont maintenant rôdés sur le processus de fabrication, mais aussi ultra-motivés pour démontrer concrètement que la mode sait aussi être solidaire. »

 

« Unis autour du IN, on a pu réagir vite et bien »

Paul Mollon, responsable du magasin de La Réserve des Arts à Pantin, spécialiste du réemploi de matériaux pour la culture.
« Le rôle de la Réserve des Arts dans cette opération a été de préparer des cartons de matière première pour fabriquer des masques en s’appuyant sur notre stock de tissus provenant, le plus souvent, d’ateliers de haute couture. Évidemment, on a bien veillé à utiliser des cotons lavables à plus de 60 degrés et à intégrer à nos livraisons le patron d’un masque fourni par le Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Grenoble. Au total, notre action aura permis de créer environ un millier de masques : c’est peut-être une goutte d’eau, mais c’est un premier élan qui a été donné et qui prouve qu’en agissant unis, on peut réagir vite et bien. Enfin, derrière cette action, il ne faut pas oublier aussi la chaîne des livreurs qui s’est mise en marche, grâce au Département de la Seine-Saint-Denis, pour distribuer un à un nos cartons de tissus dans tout le département. »

 

« Dans le 93, on a l’art de la débrouille… »

Fatimata Sy, styliste et créatrice d’une boutique de mode éthique à Montreuil.
« Lorsque j’ai dû stopper l’activité de ma boutique à Montreuil au moment du confinement, je me suis mise à faire des masques toute seule et puis j’ai fini par rejoindre le réseau des Couturiers et couturières solidaires de France : l’objectif c’était de s’organiser et de créer des masques en respectant un protocole sanitaire. Ensuite, on a créé le groupe du 93 des couturiers solidaires pour faire du micro-local, travailler sur les limites de Montreuil, Drancy, Pantin, Romainville afin d’éviter que le virus ne se propage davantage. Et puis, j’ai aussi rallié l’initiative du IN, évidemment parce que je suis ambassadrice du IN et bien sûr parce que c’était une pierre de plus à l’action d’un département qui réagit comme il le fait souvent : en se débrouillant tout seul ! Dans le 93, on a l’habitude du système D. Donc, il y a plein d’initiatives qui se montent à Montreuil et ailleurs pour aider les personnels des EHPAD, ceux qui font des maraudes pour les sans-abris, les personnels des Restaurants du Cœur, les gens qui font le ménage, les vigiles. Et puis, il n’y a pas que les masques… Dans certains hôpitaux, ils manquent de blouses, des charlottes… Alors, face à ça, c’est positif qu’un réseau comme le IN fédère les initiatives parce qu’il a l’habitude de coordonner des actions collectives. Un masque, ce n’est pas que de la couture, c’est aussi laver avant et après les tissus recyclés, repasser ce qu’on a produit, mettre chaque masque dans un sac plastique fermé. Donc, mis bout à bout, il faut bien 40 minutes par masque. Chaque minute compte et si un réseau comme le IN peut nous soutenir, nous aider grâce à sa force collective, ce sera quelques masques de fabriqués en plus… »

 

« Une fierté de participer à ce mouvement de solidarité »

Bernadette Rwegera, présidente de l’association d’insertion « La main fine » à Saint-Denis
« Pour notre association qui fait de l’insertion au travers d’activités de couture et de coiffure, s’engager dans ce mouvement de solidarité était logique. Et c’est aussi une fierté de faire partie de cette Seine-Saint-Denis solidaire. On a donc exceptionnellement mobilisé deux tailleurs et une styliste pour assembler un maximum de masques dans notre atelier de Saint-Denis. Dans cette période difficile, chacun à son niveau doit se battre avec ses moyens contre l’avancée du coronavirus : et nous, nos « armes » de couturier, nous permettent de fabriquer des masques, alors on s’est retroussé les manches pour en créer un maximum avec les chutes de coton dont nous disposons ou celle livrées par la Réserve des Arts. »

 

« Aux côtés du IN, tant qu’on aura besoin de nous ! »

 

Carole Dantin Bré, créatrice de la Maison Gavaldi, spécialiste de la robe de mariée et de soirée sur mesure, à Bagnolet
« Personnellement, j’avais déjà commencé à coudre des masques pour mon voisin qui continue de travailler dans le secteur du nettoyage et qui n’avait rien pour se protéger. Alors, lorsqu’on m’a sollicité pour assembler des masques, j’ai dit oui, tout naturellement. Je n’en pouvais plus aussi de lire la détresse des gens sur les réseaux sociaux : les soignants bien sûr mais aussi les livreurs, le personnel des supermarchés qui avaient l’impression de monter au front, totalement désarmés. Donc, on a commencé à assembler entre deux robes de mariés, notre activité à Bagnolet, des masques à partir du tissu livré par la Réserve des Arts, mais aussi en récupérant nos chutes exploitables. C’est de toute façon dans le droit fil de notre philosophie puisque chez nous tout est réutilisé, pour créer, par exemple, des coussins d’alliances originaux. Maintenant, l’idée, c’est de continuer tant qu’on aura besoin de nous, de toute façon tous les mariages sont décalés dans le temps à cause du coronavirus. Mais, ça ne veut pas dire qu’on arrête tout : si la boutique est évidemment fermée au public, on continue d’honorer nos commandes, à côté des masques, ça fait aussi du bien au moral de coudre des perles et des paillettes ! »

 

« Un coup de main naturel : c’est ça aussi être ambassadeur… »

Bastien Laurent, designer, créateur de la marque AVOC et initiateur de 0-93.LAB, programme d’initiation au design de mode à Aulnay-sous-Bois et Sevran.
« Le coup de main qu’on donne au réseau du In Seine-Saint-Denis, ce n’est pas grand-chose, mais c’est en tout cas naturel et c’est, finalement, ça aussi être ambassadeur. On a un savoir-faire qui peut aider, alors autant le mettre au service de ceux qui en ont besoin. Pour notre maison de couture AVOC qui avait beaucoup de contrats avec l’Asie, beaucoup de commandes sont de toute façon tombées à l’eau, alors on est un peu à l’arrêt et utiliser nos moyens de production pour fabriquer des masques, c’est presque une échappatoire pour continuer d’avancer et de positiver. Et puis, c’est bien que la mode ne reste pas dans son coin à regarder ailleurs en attendant que le monde reparte sans la menace du coronavirus… »

 

Propos recueillis par Frédéric Haxo