Quatre étapes In Seine-Saint-Denis pour être bien en selle

L’Atelier solidaire, la bonne étape audonienne

A Saint-Ouen, ce tiers-lieu associatif est un endroit unique pour « bricoler, créer, réparer et partager son savoir-faire » autour de la « petite reine ».

Bienvenue à l’Atelier solidaire de Saint-Ouen qui, depuis 2014, anime un lieu unique centré autour de la réparation vélo, d’un fablab et d’un « repair » café. Le jour de la visite du IN, c’est Anissa, 25 ans en service civique dans le cadre d’une formation autour de la transition écologique, qui joue les guides : « J’habite juste à côté de l’Atelier, raconte-t-elle, alors je me suis dit pourquoi pas essayer de faire mon service civique ici. Et comme je roulais déjà à vélo, ça me permet de le faire en toute sécurité. Parce que depuis six mois que je suis à l’Atelier, j’ai appris énormément de choses sur la réparation d’un cycle. En plus, ce qui est bien, c’est qu’au sein de l’Atelier solidaire, on peut toucher à tout, en dehors du vélo : la menuiserie, la soudure ou l’impression 3D… En tout cas, même lorsque j’aurai bouclé mon service civique, je reviendrai comme bénévole à l’Atelier. Le vélo, c’est l’avenir, alors autant savoir l’entretenir. »

Les valeurs de l’entraide

Et, c’est encore plus l’avenir du côté de Saint-Ouen où dans le cadre du Plan vélo sur le territoire de la Seine-Saint-Denis, de nouveaux aménagements cyclables vont voir le jour (très) prochainement.

Des pistes cyclables du 93 qui sont déjà empruntées régulièrement par Anaïs, 23 ans, étudiante en sciences sociales sur le Campus Condorcet à Aubervilliers : « Je viens de récupérer un vieux vélo d’occasion et il fallait que je le remette en état, sourit-elle en avisant sa monture verte vintage. Faire cette réparation à l’Atelier solidaire, c’est vraiment très chouette », poursuit la jeune femme originaire de Nantes. Il y a plein de bénévoles prêts à vous aider, on trouve des pièces pour réparer son vélo et on soutient une entreprise d’insertion. Franchement, je conseille l’adresse !»

Plus d’infos sur https://atelierso.fr

A Saint-Denis, l’UFOLEP 93 mise sur le cycle féminin

Depuis 1928, l’Union Française des Œuvres Laïques d’Éducation Physique s’investit pour démocratiser la pratique sportive. Et depuis cinq ans, sa section du 93 anime des ateliers de remise en selle pour des femmes du quartier du Franc-Moisin.

A quelques mètres du pont qui relie le quartier dionysien du Franc-Moisin à la majesté imposante du Stade de France, Maryam, Akhi et Fatoumata profitent de la matinée encore calme pour entamer leurs premiers tours de pédalier. Grâce à un partenariat entre l’UFOLEP 93 et l’Association des Femmes de Franc-Moisin qui travaille à l’insertion sociale et professionnelle des familles étrangères dans le quartier depuis 1980, le trio féminin peut apprendre, enfin, à faire du vélo à l’âge adulte. « Et pour elles, c’est hyper-important de se mettre en selle, parce qu’elles accèdent ainsi à un rêve de gamine, quelque chose qu’elles n’ont pas pu faire dans leurs pays d’origine, par manque de moyens ou parce que c’était réservé aux garçons », explique Gwladys Guillaume, médiatrice au Franc-Moisin en duo sur cet atelier avec une salariée de l’UFOLEP 93, spécialiste de l’encadrement des néophytes du cycle. De cette façon, elles se dépassent et se donnent aussi du courage pour aller chercher un métier, apprendre le français. »

Et du courage, il en faut à Akhi, originaire du Bangladesh, pour se dresser sur ses pédales malgré un équilibre encore très précaire : « Mais, ça va, ça va !», sourit-elle, fermement agrippée à son guidon.

Pendant, ce temps-là, Maryam, 28 ans, originaire de Côte d’Ivoire en profite pour faire une petite pause à nos côtés et souffler : « C’est difficile, mais amusant, en tout cas c’est important pour moi d’apprendre à faire du vélo parce que plus tard je voudrai aussi savoir conduire pour trouver un travail. Mais, il faudra apprendre le code de la route et ça c’est un peu dur parce que je ne suis pas allée à l’école. Heureusement, avec l’association, on apprend beaucoup et ça donne le moral », glisse-t-elle avant de réenfourcher sa monture.

Des envies d’échappées cyclistes…

Des paroles qui confortent l’action de l’UFOLEP 93, fédération d’éducation sportive populaire, qui cherche en permanence à élargir la pratique sportive et l’activité physique au quotidien. « Ces ateliers avec les Femmes de Franc-Moisin sont organisées dans une logique d’émancipation féminine », explique Robert Turgis, le délégué départemental de l’Union. Les femmes prennent ainsi du temps pour elles, sortent de leur rôle assigné de femmes ou de mères pour trouver de la confiance en elles et du bien-être à travers une activité physique. Et puis, il y a derrière ces ateliers de mise en selle, un vrai enjeu de mobilité pour ces femmes. Qui ira d’ailleurs croissant avec l’extension et l’amélioration du réseau de pistes cyclables que programme le Département de Seine-Saint-Denis en prévision des Jeux de 2024. »

Sans oublier qu’à l’horizon 2030 avec l’ouverture progressive des stations du Grand Paris Express, l’ensemble des habitants de Seine-Saint-Denis se trouvera alors à 2 kilomètres d’une gare. Autant dire qu’une « future petite balade » à vélo fait déjà rêver Maryam : « Oui, je serai bientôt capable d’aller à un rendez-vous sur mon vélo, j’en suis sûre ! »

En savoir plus : UFOLEP 93

A Montreuil, démontage à tous les étages avec OHCYCLO…

Faire réparer son vélo, c’est bien mais encore faut-il trouver des pièces détachées. L’une des missions d’OHCYCLO qui organise des ateliers de démontage avec des bénévoles.

Depuis 2012, l’association OHCYCLO basée à Montreuil déploie des ateliers mobiles d’auto-réparation de vélos, souvent en lien avec les centres sociaux montreuillois ou ailleurs en Seine-Saint-Denis. Tant et si bien qu’en rendant accessible, à tout public, la réparation de vélos par soi-même et à proximité de chez soi, OHCYCLO revendique aujourd’hui près de 1200 adhérents. Un large public qui se retrouve régulièrement dans le vaste atelier de l’association situé dans le centre-ville de Montreuil. Et ce soir d’octobre, c’est ambiance démontage pour les bénévoles présents, car pour réparer il faut bien disposer de pièces de réemploi. Un savoir-faire que maîtrise OHCYCLO avec, à titre d’exemple, plus de 60 kg de pièces récoltés sur une masse de 120 kilos de vélos en un seul mois d’activité : « Clairement, lorsqu’on récupère des vieux vélos, on recycle tout ce qu’il est possible de garder, indique Marine Le Meur, coordinatrice du réemploi au sein d’OHCYCLO. Et si un cadre ou une roue est vraiment hors d’usage, on l’envoie chez un ferrailleur près de chez nous, pour agir de la manière la plus éco-responsable possible. »

Une « montagne » de pièces détachées

Voilà comment OHCYCLO met à disposition de ses adhérents, une incroyable banque de pièces détachées pour une adhésion annuelle de 20 euros. Encore faut-il pour cela animer régulièrement des grandes sessions de démontage des vélos sous la houlette de bénévoles expérimentés. Jean-Claude, Montreuillois de 53 ans, est de ceux-là… Après une formation au printemps dernier de mécanicien et animateur cycles, dispensée par OHCYCLO et Make Ici, le tiers-lieu montreuillois de l’innovation et de la formation, ce dernier met la main à la pâte pour démonter et récupérer les précieuses pièces mécaniques : « Ce que je fais ici correspond à mes valeurs écologiques, explique-t-il. Et puis, ça a du sens, socialement, d’aider des gens à entretenir leurs vélos à moindre coût. Au bout du compte, ça me permet également de parfaire ma formation puisque je compte désormais monter mon activité de sensibilisation au vélo et aux mobilités douces. »

Comme quoi, chez OHCYCLO, pour paraphraser un tantinet le principe de Lavoisier, père de la chimie moderne : « Rien ne se perd et tout se transforme ! »

En savoir plus : www.ohcyclo.org

A Stains, l’immense rayonnement des Rayons

La régie de quartier créée en 2013 dans le quartier du Clos Saint-Lazare s’emploie à faire rayonner l’activité vélo dans de multiples domaines.

Régie de quartier implantée sur le quartier du Clos Saint-Lazare à Stains depuis 2013, les Rayons s’évertue à promouvoir la pratique du vélo dans les quartiers de Stains et de Plaine Commune en proposant des animations et ateliers pour adultes et enfants. L’accompagnement des habitants est d’ailleurs largement facilité par la création en 2022 d’un poste de Conseiller Mobilité au sein des Rayons. Dans son local de l’Atelier Sand au Clos-Saint-Lazare où il tient ses permanences, Anas Dwaik peut ainsi « aider les habitants à se déplacer plus rapidement, de manière plus écologique mais aussi plus économique. » A côté de cela, le trentenaire grandi en Palestine, est aussi le pilote de la vélo-école des Rayons. Et puis, les Rayons s’attachent aussi à développer un autre projet primé par le dernier Appel à Agir In Seine-Saint-Denis : une activité cyclo-logistique de récupération des cagettes des marchés des villes de Plaine Commune pour en faire du broyat pour le jardinage.

Toujours sur ce même créneau de la cyclo-logistique, Les Rayons et la Régie de quartier de Saint-Denis se sont également associées en 2020 pour créer le collectif Les Cyclopes, une marque dédiée à l’activité de livraison à vélo à destination des entreprises. Au total, ce sont donc, aujourd’hui, une douzaine de salariés en insertion qui font tourner l’activité de cyclo-logistique stanoise. Avec une ambition simple résumée par Xavier Vander Auwera, coordinateur lien social et mobilité » de la régie de quartier : « Être utile socialement et écologiquement pour les habitant.e.s du 93. »

En savoir plus : www.lesrayons.fr

Frédéric Haxo

Crédits photos : Bruno Levy